Comparatif Honda CBF 600 S / Kawasaki 650 ER-6f / Suzuki 650 Bandit S / Yamaha 600 XJ6 Diversion
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Comparatif Honda CBF 600 S / Kawasaki 650 ER-6f / Suzuki 650 Bandit S / Yamaha 600 XJ6 Diversion
Roulez (af)futé. Trois 4-cylindres et un twin pour voyager à bon prix. Sur le discret créneau de la routière de moyenne cylindrée, la Suzuki Bandit et la Honda CBF S poursuivent leur carrière avec succès. Deux nouveautés tentent de leur ravir la couronne. Leurs arguments – carénage intégral et motorisation pétillante pour la Kawasaki, homogénéité pour la Yamaha – sont-ils suffisants ? Réponse au terme de
1 500 kilomètres sur les routes de France.
Avouons-le : jusque-là, il n’a pas été trop difficile pour Suzuki et Honda d’imposer leurs montures comme des valeurs sûres de la route, la concurrence japonaise n’ayant à leur opposer que des machines peu adaptées à l’exercice. De fait, entre une Fazer orientée sport, dotée d’un bloc 100 ch avec ses pots sous la selle, et une ER-6f, simple roadster affublé d’un carénage aussi lourd esthétiquement que peu protecteur, il était grand temps pour ces deux firmes de renvoyer leurs ingénieurs à leurs études...
Chez Yamaha, on a donc décidé de partir d’une feuille blanche pour concevoir une machine totalement nouvelle et, surtout, conçue dès le départ comme une routière et non comme un roadster « adapté » à la route. Démarche un peu différente pour Kawasaki, qui profite d’une petite refonte de son best-seller, l’ER-6, pour proposer une version f au carénage intégral totalement inédit.
Les présentations faites, rentrons dans le vif du sujet...
Couleurs acidulées, lignes tendues et modernes, la Yam’ et la Kawa ont, d’entrée de jeu, les faveurs de Sébastien et de François, lecteurs conviés sur ce roulage. Ils n’ont d’yeux que pour elles, en dépit de leur culture motocycliste respective. Seb, la trentaine, roule sur une GSX-R 1100 des grandes années (les fameuses « air-huile »), limite légale...
En images
Prise en main : L’insolence de la jeunesse.
La cinquantaine dynamique, François ne jure que par la marque qui colle à son « rang » : BMW. Diversion et ER-6f réussissent donc leur coup question style, un bon point pour une future carrière commerciale... Et un vrai coup dur pour les deux autres, à peine remarquées par nos invités ! Entre la Bandit S et la CBF 600 S, c’est « Bonjour tristesse »... Et les commentaires acerbes fusent : « C’est quoi cet échappement sur la Bandit ? Un gazogène ? » Pas de jalouses, la Honda a aussi droit à son coup de griffe : « Noire, triste, banale, quand on voit la beauté de la dernière CBR 1000 RR, on se demande si la CBF est une Honda... » (sic).
Une fois de plus, l’adage qui prétend que style et fonctionnalité marchent rarement main dans la main se confirme...
À l’heure d’arrimer les bagages, ceux qui se sont jetés sur la Div’ et l’ER-6, hypnotisés par les sirènes de la nouveauté, en sont pour leurs frais... Votre serviteur en tête, qui se demande comment embarquer son barda sur cette Diversion qui lui faisait les yeux doux depuis le matin. Selle plate, poignées passager mal foutues (impossible de passer le crochet d’un tendeur), pas d’ergot d’arrimage, des platines repose-pieds « pleines »... La misère ! Et pour une machine à vocation routière, un très mauvais point ! François n’est guère mieux loti. Aimanté par l’ER-6, il rencontre lui aussi des soucis de logistique... En cause, une selle passager fuyante (risque que le bagage glisse lentement) et des poignées passager « ouvertes » (impossible d’y arrimer des tendeurs). Pour comble, c’est la seule à ne pas avoir de béquille centrale, et il doit charger de biais : pas cool. Heureusement, deux ergots salvateurs sous la coque et des platines repose-pieds pratiques (en tubes ajourés) lui sauvent la mise, mais il s’en fallait de peu qu’il ne pleure sa BMW et ses aspects pratiques... Sébastien et Stephen (notre photographe) ont, à coup sûr, tiré les bons numéros.
Le premier n’a aucune peine à charger la Bandit, équipée d’une poignée passager transversale (pratique pour caler son sac), munie d’ergots et de platines repose-pieds ajoutées « exprès » pour accueillir les tendeurs (miam...). Mais la palme du chargement revient sans conteste à la Honda, qui accueille sans souci le matos photo de Steph’. Une selle large, des ergots moulés sous les poignées passager, deux autres montés sur l’avant de la selle passager et, pour finir, un ergot supplémentaire sur l’attache-silencieux avec une lumière de l’autre côté (à condition d’ôter le cache-bouchon en caoutchouc). Ce « trou » sur la platine gauche s’explique par le fait que les CBF 600 et 1000 partagent les mêmes platines (sur la 1000, le trou reçoit la grosse fixation de l’échappement gauche). Dernier détail, les quatre motos disposent d’un réservoir en acier, capable de recevoir une sacoche magnétique, bien.
Les atouts de la maturité. Bagages arrimés, commandes et rétros réglés, réservoirs pleins, nous mettons cap sur la Bourgogne, terre d’asile de notre essai. Passons rapidement (pour une fois) sur le chapitre ville, où toutes nos motos s’en tirent avec honneur, pour se pencher sur les réelles aptitudes routières de ces machines.
Nous filons bon train dès potron-minet, sous un soleil rasant printanier (enfin !). Le moral des troupes est au beau fixe, et les contrôles radar (à peu près tous les 100 km !) défilent. Fontainebleau, Nemours, Montargis, Auxerre, Avallon, Saulieu, Chalon-sur-Saône, les étapes se succèdent, et les kilomètres accouchent peu à peu de leur verdict... Sur la Diversion, je commence à trouver le temps long. La position de conduite est parfaite, mais la selle, étroite et dure, ne tarde pas à m’occuper l’esprit tandis que les turbulences engendrées par la bulle, un poil trop verticale, malmènent mes cervicales.
François, sur l’ER-6 depuis Paris, attaque une gymnastique assez évocatrice... debout sur les repose-pieds, histoire de détendre fessiers et dos. À la faveur d’un arrêt ravitaillement, il nous avoue apprécier la protection offerte par le bas de carénage et l’absence de vibrations du twin. En revanche, il déplore la dureté de la selle, une vraie planche (comme sur la Diversion) et la faible utilité de la bulle (trop basse). Sébastien, perché sur la Bandit (il a réglé la selle en position haute), finit tranquillement sa nuit.
À mes interrogations gestuelles sur son état physique, il répond invariablement par un pouce levé, accompagné d’un sourire qui en dit long sur le plaisir qu’il prend aux commandes de la « vieille » Bandit. Selle accueillante, bonne protection, la Suz’ ne pèche que par de légères vibrations parasites qui endolorissent mains et pieds par moments. Quant à Stephen, il ne lâche pas la Honda, au point d’effectuer les ravitaillements assis sur la bête ! « Super ! Aucune vibration moteur, confort, protection... Avec la selle en position basse et la bulle en position haute, t’es le roi de la route ! Mais la gueule, j’ai un peu de mal... » Ce premier constat routier est sans appel, les « anciennes » ont encore de beaux restes !
Moteur - Comportement : L’heure de vérité
Après le verdict de la grand-route, place aux virolos rigolos ! À Savigny-lès-Beaune, nous décidons de remonter vers Château-Chinon via les départementales. Le tempo se fait plus chaloupé, entre manoirs et castels bourguignons. L’heure de la revanche a sonné pour les produits de l’année. La Diversion ouvre le bal, son châssis neutre et équilibré est un véritable atout. Il est possible d’enrouler à bonne allure, malgré des suspensions tarées « souple ». Le moteur, travaillé pour offrir de la rondeur aux mi-régimes, réduit à l’essentiel le dialogue avec le sélecteur, mais la boîte de vitesses se montre curieusement bien plus récalcitrante que celle de la moto essayée lors de la présentation mondiale (Moto Mag n° 255). Huile différente ? Rodage bâclé ? Mystère...
Autre bonne surprise à l’attaque des courbes, la Kawasaki, elle aussi revancharde ! Légère, agile et armée d’un moteur vivant, c’est la plus appréciée en conduite rapide. Ni plus puissante ni plus efficace que la Yamaha, mais tout simplement plus drôle à mener ! Un plaisir somme toute facile à analyser : c’est la plus légère, elle a l’empattement et l’angle de colonne les plus réduits, et sa zone de couple maxi se situe à des régimes bien plus bas que celle des 4-cylindres. Tout le contraire de la Honda, qui officie avec un ascétisme presque maladif. Elle est efficace (au point de suivre les deux autres sans trop forcer), mais ne délivre aucune saveur à celui qui la mène. Illustration : lors des pauses, chacun lui reconnaît moult qualités (châssis sain, moteur plaisant dans les tours, freinage intégral, facilité à la limite, etc.), mais à l’heure de prendre la route, personne ne se précipite dessus ! Les voies du plaisir à moto sont impénétrables !
Et la Bandit ? Sortie du contexte autoroutier, la Suz’ (et sa conception d’une autre époque) a vite montré ses limites. Lourde (elle frôle le quart de tonne !), traînant une inertie qu’il faut combattre à chaque changement d’angle, elle demande de l’implication à qui veut en tirer le max. Reste le moteur, sympa et toujours dans le coup. Mais face à des motos modernes, le mode coulé/rapide sur petite route lui est fatal...
Au moment d’appuyer sur le levier, enfin, décerner la médaille d’or à la Honda et à son freinage intégral couplé à l’ABS (de série, s’il vous plaît), un atout sécurité/plaisir indéniable, s’impose sans discussion. Derrière, la XJ6 et l’ER-6f, équipées du même matériel et pesant sensiblement le même poids, donnent des résultats équivalents et... normaux. Enfin, la Suz... Malgré des étriers à 4 pistons, elle a du mal à stopper sa masse. Saluons aussi les progrès des systèmes ABS, discrets dans leurs interventions, pour le plaisir de « freiner fort »...
Verdict
Une fois n’est pas coutume, c’est, comme on dit, dans les vieux pots que l’on fait la meilleure soupe. Le proverbe rejoint à merveille les conclusions de cet essai. À l’épreuve des kilomètres autoroutiers, la Honda s’est montrée impériale de confort et de protection. En rajoutant une bonne autonomie, une consommation raisonnable, le CBS/ABS et un tarif concurrentiel, c’est la gagnante de ce comparatif. Seul bémol, un manque cruel de personnalité... Juste derrière, la Suz’ rafle la médaille d’argent. Ses défauts (poids, gabarit) deviennent des avantages lorsqu’il s’agit d’avaler les bornes, apportant confort, protection et stabilité. Et que dire de son prix (6 249 € avec ABS), toujours imbattable...
De leur côté, les deux nouveautés présentent trop de lacunes pour prétendre au grade de vraies routières. Malgré son tarif le plus élevé (7 199 €), la Kawa décroche la médaille de bronze grâce à son carénage intégral. La Yam’, enfin, est trop juste pour un usage purement routier, côté confort et aspects pratiques.
Mais elle est, de loin, la plus jolie pour aller danser...
Avec la participation des deux François (Barrois et Moutou) et de Sébastien « Twix » Roux.
Commandes Toutes offrent des commandes au pied réglables (sélecteur et pédale de frein) et, côté guidon, un réglage
d’écartement du levier de frein et du levier d’embrayage... sauf la Yamaha, qui se passe du réglage de l’embrayage (pas cool). Les selles de la Suz’ et de la Honda sont réglables en hauteur, et les guidons de la Yamaha et de la Bandit sont ajustables en inversant les pontets (bien vu).
Rétroviseurs Montés sur les carénages plutôt que sur les guidons, et bien écartés, ils apportent (sur les quatre motos), une rétrovision acceptable. Ils vibrent un peu sur la Kawasaki sans, pour autant, nuire à l’efficacité. Un bon point dans l’ensemble, donc.
Béquille Latérales et centrales pour tout le monde, exception faite de l’ER-6f, qui se passe de centrale, un vrai mauvais point à nos yeux ! Quant aux poignées de levage, elles se réduisent aux poignées passager, toutes trop en arrière par rapport à l’axe de la béquille centrale.
Antivol Clés codées pour toutes, sauf pour la Bandit. Il est possible de loger un U sous les quatre selles, mais la place est comptée. Pour les bagages, se reporter au texte principal...
Carburant Aucun des réservoirs ne refoule, mais les petits orifices genre « SP 95 » ne sont pas pratiques ! Tous les bouchons sont montés sur charnière et équipés d’un verrou.
Entretien courant
Huile moteur Hublot de contrôle sur la Honda, la Suzuki et la Kawasaki, et orifice de remplissage sur les carters d’embrayage. Bouchon-jauge sur la Yamaha, ce dernier étant compliqué à atteindre (moteur chaud, on se brûle les doigts).
Batterie et fusibles Sous les selles pour tout le monde.
Tension de chaîne Par axe tiré, façon mobylette, sur toutes les motos ; aussi simple qu’efficace. Sur la Kawa, le système est un peu plus chiadé, ce qui ne compense pas l’absence de centrale...
Trousse à outils La Yamaha se distingue par une trousse à outil complète et de bonne facture. Pour les trois autres, c’est le strict minimum, et de mauvaise qualité. Il est toutefois possible d’effectuer les tensions de chaîne et autres petites bricoles.
Suspensions Côté amortisseur, la précontrainte est de rigueur sur les quatre, mais pas l’hydraulique (tarif serré oblige). La précontrainte de la fourche est réservée aux seules Bandit et CBF.
Rouler à deux
Honda ou Yamaha ? Jusqu’au bout, départager ce duo de tête s’est révélé très difficile. La seconde l’emporte finalement (après un ultime essai autoroutier sur plus de 300 km), grâce au confort de sa selle et à sa légère bosse antiglissement, même si, de prime abord, l’étroitesse peut surprendre. La Honda s’incline en raison d’une selle beaucoup trop ferme et de vibrations qui remontent le long des jambes. Entre autres avantages, le passager de la Div’ n’a pas les jambes repliées (contrairement à celui de la Kawa, en photo ci-dessous, dont les repose-pieds sont trop haut placés) et ne ressent ni vibrations, grâce à des platines repose-pieds montées sur silentblocs très souples, ni turbulences. Le silencieux placé sous le moteur (et non sur le côté) évite enfin les brûlures. Bravo ! Les poignées latérales en résine auraient toutefois gagné à être montées un peu plus haut, permettant de compenser l’étroitesse de la selle et une meilleure prise en main. Côté puissance, 600 cm3, ça rame un peu.
Éclairage
Reine de la nuit, la Kawasaki ER-6f ! Son code est un véritable tapis de lumière, au point de rendre son feu de route superflu, lequel est d’ailleurs un peu trop concentrique. En deuxième position vient la Honda CBF 600 S. Son code assure une visibilité correcte (quoique moins large et moins long que celui de la Kawa), que le plein phare seconde parfaitement. Médaille de bronze pour la Diversion qui, malgré un éclairage en code assez bizarre (passé 25/30 mètres, le faisceau coupe net sur la route, occasionnant un trou noir au-delà) se rattrape avec un feu de route homogène et puissant. Lanterne... rouge pour la Bandit, dont le code est digne d’équiper une mobylette (faisceau faiblard et jaunâtre), secondé sans conviction par un feu de route correct, sans plus. Un détour par notre comparatif « lampes » (Motomag N°255) et un changement d’ampoule s’impose dès l’achat...
L’avis de François
Roule en BMW R 1100 S
J’adore ! Pour moi, sur une moto, le plaisir des yeux compte autant que l’efficacité. La Yamaha Diversion est celle qui correspond le mieux à ce principe. L’esthétique a été convenablement travaillée, sans nuire aux fonctionnalités. Bien sûr, son 4-cylindres n’a pas le tempérament de la Kawa ER-6f, ni la hargne dans les tours de la Honda CBF 600. Mais en conduite coulée ou sportive, elle s’en sort avec brio, et sa tenue de route est très neutre. Mais j’apprécie tout autant le soin apporté à certains détails de finition, comme les durits de refroidissement protégées, la couleur noire du moteur, le becquet échancré en résine. Et plus encore, l’échappement sous le moteur, avec la sortie sur le côté, très discrète. C’est classe et ça évite de se brûler comme sur l’immonde pot d’échappement de la Suzuki.