Il y a deux ans, nous participions en exclusivité à un raid, l’Himalaya Odyssey, au guidon de la première mouture de cette machine indienne. En 2018, elle nous est présentée sur les hauteurs de Marseille dans sa configuration Euro 4, c’est-à-dire avec un moteur doté de l’injection et un freinage ABS.
Cette Himalayan est une moto atypique. La marque est clairement partie d’une feuille blanche pour concevoir son châssis et son moteur. Le cahier des charges : élaborer un trail polyvalent destiné au plus grand nombre de marchés possibles de la planète.
Présentation
Il s’agit donc d’une moto de 411 cm3 dotée d’une position de conduite bien droite, d’une selle confortable et d’une vraie place pour le passager. Elle est équipée d’un large porte-bagages et le réservoir de 14 litres est enserré par un arceau capable de recevoir des sacoches sur ses flancs, voire un jerrican. Quelques attributs qui laissent présager une belle disposition au voyage…
Notons que la finition n’est pas aux standards nippons, mais le prix fait vite oublier ces détails.
Le moteur inédit est étudié pour répondre aux actuelles et futures normes antipollution. À terme, les Bullet pourraient en être équipées pour satisfaire aux exigences de la norme Euro 5. C’est un monocylindre à simple arbre à cames et deux soupapes refroidi par air. Il développe 24,5 ch à 6 500 tr/min. Vous voilà avertis pour la puissance. Le voyage sera tranquille. Ce qui, en contrepartie, devrait lui garantir facilité d’entretien et longévité. Car cette moto est pensée globalement comme une machine-outil, simple et fonctionnelle.
Absence de kick
Les pieds bien au sol malgré mon 1,70 m, j’attrape le starter au guidon en me disant que l’injection ne doit pas être de toute dernière génération ; puis je presse le démarreur. Eh oui, le kick a disparu. Le petit mono s’ébroue alors en distillant une sonorité bien agréable via un silencieux inox. C’est sur les petites routes provençales que s’effectuent les premiers kilomètres, et la magie y opère rapidement.
L’Himalayan est d’une facilité déconcertante. Son châssis lui confère une très grande stabilité, et si la roue de 21’ la prive d’un peu de vivacité, c’est presque tant mieux ; l’Himalayan s’apprécie en conduite coulée, sans brusquerie. Le frein avant est à l’avenant, sans gros mordant mais puissant et facilement dosable, et l’élément arrière permet d’asseoir parfaitement la moto. Les pneumatiques, des Pirelli MT60 au profil mixte, offrent un grip satisfaisant.
Pas de coup de pied au cul…
Mais pour ceux qui en veulent plus, à l’exemple des gamins qui remettent le doigt dans le pot de confiture, et qui ouvriront les gaz en grand, le petit bloc vous rappellera rapidement que la gourmandise est un vilain défaut ! Pas d’accélération franche, pas de coup de pied au cul. Ce bloc est étonnamment souple et donne le meilleur de lui-même entre 2 500 et 5 000 tr/min (100 km/h) sans jamais une saute d’humeur. Il est capable d’une pointe à un bon 120 en début de zone rouge, soit 6 500 tr/min, sans qu’apparaissent de vibrations désagréables. La boîte de vitesses et l’embrayage, eux, sont doux et précis, ce qui n’était pas le cas du modèle testé il y a 2 ans.
Le verdict
Cette Himalayan ne présente pas de défaut si l’on fait uniquement ce pour quoi elle a été conçue, à savoir les chemins et le voyage au long cours. Là, pour 4 495 €, elle en donne pour son argent. Ses concurrentes, on peut nommer la Honda CB 500 X et la Suzuki 650 V-Strom – qui font mieux sur route –, ne peuvent s’acquérir que d’occasion pour cette somme. Mais l’indienne, faute d’avoir un moteur ludique, pourrait avoir du mal à séduire.
Dans le village du Castellet, à proximité du célèbre circuit, nous nous faufilons dans les ruelles étroites et escarpées. Bloqués par la camionnette du boulanger, nous descendons quelques marches et repartons en direction du mont Côme à la recherche de quelque chemin de terre. Là encore, sans surprendre, la machine fait le job. La roue de 21 pouces avale trous et racines, les suspensions travaillent efficacement et la position debout sur les repose-pieds permet un guidage efficace. Le moteur est un allié : il ne bouscule jamais et accepte les erreurs de régime. Sable, terre ou chemin boueux, l’Himalayan passera. Les descentes de pierriers rappellent que l’ABS n’est pas déconnectable et qu’il donne de méchants retours dans la pédale. Et attention, quand même, aux 185 kg : il faut oublier les sauts de cabri et les spéciales chronométrées !
Au final, cette moto me fait penser au vélo de notre enfance, celui qui nous menait à l’école, avec lequel nous faisions du cross dans la forêt et que nous jetions dans l’herbe pour faire une partie de foot. Une machine à vivre, sans contrainte.