La Stella Alpina est une concentration moto internationale qui a lieu, chaque année, le deuxième week-end de juillet en Italie, non loin de Bardonecchia (de l’autre côté du tunnel du Fréjus). Pas d’inscription, ni d’organisation, juste un rassemblement à 2.000 mètres d’altitude au bord d’un lac et d’une cascade.

Pour y accéder, une piste praticable par toute moto, pourvu que le carénage ne soit pas trop bas et fragile. Camping, bien sûr, et être autonome en repas et boissons (l’eau de source y est gratuite, très fraîche et à volonté !), telle est la logistique à prendre en compte avant le départ.

Sur la route
Nous sommes partis de Romans (Drôme) vendredi 10 juillet au matin avec la FFMC 26/07, pour rejoindre Bardonecchia (Italie), en passant par Grenoble et Bourg d’Oisans. Nous faisons une pause déjeuner en bas du col du Lautaret, sous un soleil magnifique.

Nous enfourchons nos engins, direction Briançon, la vallée de la Clarée et le col de l’Échelle. Arrivée à Bardonecchia vers 15h, soit près de 280 km parcourus dans la journée. Une pause bien méritée dans un bar près de la gare, nous commandons des bières bien fraîches. Je ne sais pas si ce sont nos têtes fatiguées par la route ou la coutume dans ce bar, mais le serveur nous apporte gracieusement un plateau d’apéritifs à grignoter (petites pizzas, pain grillé sur lit de tomates, chips …).

Attiré par une GS 1200 flambant neuve, je fais la rencontre d’un Belge, marié, père de deux enfants, qui m’indique être descendu seul. Pour lui « La Stella » est une cure, une pause dans son quotidien d’homme surmené…

Concentration internationale
Je suis surpris par les différentes montures, on peut voir des motos récentes, plutôt typées trail, enduro, baroudeuses ou certaines très anciennes, on se demande même comment elles ont réussi à venir jusque-là… On peut voir des Espagnols, Allemands, Anglais, des Italiens bien sûr et quelques Français.

Notre périple ne s’arrête pas là, l’aventure ne fait que commencer. Régis, président de la FFMC 26/07, nous garantit un dépaysement total en seulement quelques kilomètres. Nous quittons donc la ville pour rejoindre le campement situé à 2.000 m d’altitude.

Goudron… déplumé
Nous empruntons une route goudronnée, mais goudronnée il y a bien longtemps. Le temps et le passage des voitures, camions, motos ont laissé apparaître de beaux nids de poules, parfois même de la taille de nids d’autruches ! Avec nos motos de route (VFR, Z1000 SX, Speed Triple), nos trails équipés de pneus routiers (V-Strom et SMT 990, Moto Morini), nous roulons prudemment sur cette « route » étroite où nous avons du mal à croiser les véhicules descendants.

Sentier
Petit à petit, la route se transforme en chemin puis en piste poussiéreuse. En quelques centaines de mètres, nous sommes passés de la ville à une étape du Dakar. Je suis, coûte que coûte, notre président qui ouvre la route. Derrière lui, un nuage de poussière, on n’y voit pas à un mètre, le respect des distances de sécurité est primordial et pourtant je sens que ça pousse derrière moi. Quatre enduros avec des crampons nous déboîtent à vive allure. L’accueil est du coup beaucoup moins chaleureux.

Dos d’âne
À la sortie du bois, une clairière, on peut voir trois ou quatre tentes. On pense tous être arrivés à destination, quand je m’aperçois que Régis continue de plus belle son ascension. Tous les 20 mètres environ, il y a des dos d’âne suivis d’une cuvette. Aménagement vital pour maintenir praticable le chemin et drainer les eaux pluviales, mais très éprouvant pour les machines et nos petites carcasses.

On monte un véritable col de montagne, avec tous les kilomètres un demi-tour à 180°, sans aucune visibilité et sur un sol très glissant. Sans compter sur ceux qui descendent à toute balle.

Le week-end commence enfin
Nous arrivons enfin à notre campement, nous ne sommes que vendredi et pourtant déjà une centaine de tentes sont installées sur le site. Nous longeons la rivière et garons nos motos à côté d’un side-car blanc. Celui de Hug’, un gars du Sud-Ouest venu avec Jacques passer le week-end.

Régis fait plusieurs concentrations dans l’année, surtout des hivernales. Il a connu Hug’ il y a quelques années. Nous traversons un petit pont en bois et nous commençons à dresser le camp. Le week-end commence enfin.

Quel cirque !
Nous sommes au cœur d’un cirque de montagnes. Il semblerait que nous soyons chanceux cette année, la neige et la pluie n’ont pas été invitées. Bercés par le bruit de la cascade, nous allons passer la nuit au frais. Au-delà de la nourriture et de l’eau, un autre élément vital manque à l’appel : le bois. Nous voilà repartis sur la piste à la quête de branches mortes, car au campement, il n’y a pas le moindre arbre ou coin pour se mettre à l’ombre, l’après-midi il y fait très chaud, et le soir très froid.

Nous faisons connaissance avec nos voisins. Une concentration de motards, c’est avant tout un lieu d’échanges et de rencontres. La journée ne serait pas complète sans faire le tour du parc moto. On peut compter 8 BMW GS pour 10 motos. La BMW est une belle moto, maniable et fidèle, mais vu son prix, je suis étonné d’en voir autant. Il y a des millésimes de toutes les années, tous les modèles et toutes les options possibles et inimaginables. On comprend mieux pourquoi un concessionnaire BMW a fait le chemin avec son camion !

Bizutage
L’heure du repas a sonné. Le programme indiquait d’être autonome en nourriture et en boisson. Nous avions donc pris des pâtes, du riz, des boîtes de conserve et des bouteilles d’eau. Alors que les anciens ont prévu les saucisses, les merguez, et le canon de rouge !

Partage
Nous nous sentons bien mal face à nos vieux briscards. Pas question pour eux de manger chacun dans son coin. On met tout en commun et on partage. Et c’est ainsi que nous avons passé une excellente soirée au coin du feu. Au fil des conversations, les anecdotes d’anciennes concentrations remontent, et nous nous sentons comme des bleus, nous vivons notre première concentration et c’est magique.

Après une nuit humide et glaciale, aux alentours des 8 °C, nous prenons notre petit-déjeuner au coin du feu. Et là encore les différences d’expériences s’affichent. Avec nos pauvres petits sachets de café soluble, nous n’arrivons pas à rivaliser avec la cafetière italienne de Régis. Mais comment avez-vous fait pour emmener tout ça sur la moto ?

Balade
Le samedi est rythmée par la visite de Bardonecchia et une petite virée à moto jusqu’à Sestrière.

Dimanche matin, 7h environ, j’entends à moitié endormi, mais depuis un petit bout de temps tout de même, le ronron des moteurs. Je me lève en sursaut et réveille, en retournant sa tente, mon pote Cyrille. Il faut partir, ils sont déjà tous debout ! La veille nous nous étions fixé comme objectif de monter au sommet. Je ne voudrais surtout pas tarder, de peur de monter au moment où tout le monde descend.

Cyrille roule sur une Kawasaki Z1000 SX, impossible pour lui de mettre sa machine sur la rocaille qui nous attend. Déjà qu’elle a pas mal souffert pour arriver jusqu’au campement… Encore la tête dans le seau, il s’habille péniblement et grimpe derrière moi.

Avec la KTM SMT 990, nous quittons le campement et commençons notre ascension. Nous sommes à 2.000 m d’altitude et le sommet se situe à 3.009 m. Grimper là-haut à deux sur la moto était un pari risqué, car mine de rien, le coco pèse son poids, et qu’il est encore à moitié endormi (il n’a pas eu son café !).

Pause à mi-parcours
La piste est encore plus étroite que celle de la veille et le chemin poussiéreux, se transforme petit à petit en chemin rocailleux. La SMT et ses pneus de route n’apprécient guère les cailloux. À la mi-parcours nous faisons une pause.

J’alimente mon compagnon de fortune en jus d’orange et céréales, car il est vraiment crevé. Nous avons une vue magnifique sur les montagnes environnantes. Un couple en side-car est déjà sur le chemin de la descente. Mais comment fait-elle pour rester à côté de lui, à quelques centimètres du vide ?

Il faut avoir une confiance à toute épreuve. Ceci nous renvoie à la veille où l’hélicoptère a dû intervenir pour sauver le conducteur d’un autre side, un peu trop optimiste sur la piste. Chapeau à ces sauveteurs en montagne et au pilote de l’hélicoptère qui a déposé les médecins à quelques centimètres à peine de la victime. Cette scène nous a bien tous refroidis.

Cyrille reprend des couleurs et de l’énergie, nous sommes prêts à affronter la suite. Les belles GS 1200 si majestueuses au campement font moins les fières dans le col. Nous venons à la rescousse d’un motard qui semble épuisé et n’arrive plus à maintenir sa moto en équilibre.

Un autre l’a simplement couchée sur le côté dans une épingle un peu trop raide. Nous commençons à voir apparaître la neige sur les bas-côtés et pourtant il fait toujours aussi chaud. Au détour d’un virage, nous apercevons un rassemblement de motos garées en épi de part et d’autre de la voie. Un Trafic gris est garé dans le sens de la descente et une file d’attente de plus de 40 mètres s’étend derrière lui. C’est la remise des médailles, tee-shirt et autocollant souvenir. Un ouf de soulagement nous envahit tous les deux !

Nous y retrouvons un motard venu d’Angleterre avec un engin de son époque, je dirais 1950.

La médaille se mérite
Cyrille propose de redescendre, sauf que je n’avais pas dit mon dernier mot. Nous ne sommes pas encore au sommet, la médaille se mérite, nous devons continuer. Cette fois, la neige n’était plus sur les bas-côtés, mais sur la piste. À deux, avec des pneus de route ce n’était pas gérable. Nous avons donc pris des raccourcis pour couper les endroits enneigés. Après une bonne demi-heure de chaos, nous arrivons enfin au sommet. Notre joie s’est faite entendre à des kilomètres à la ronde. Nous l’avons fait ! Nous pouvons être fiers !

On laisse la moto pour visiter les abords du lac et admirer le paysage à perte de vue. Une montée infernale s’improvise sur la droite du lac. Un Italien en Gas Gas s’y essaye, mais sans succès, il n’arrivera pas jusqu’en haut.

Cyrille toujours dans une forme olympique, me rappelle que le plus dur reste à faire : redescendre au campement sans embûches.

Petits raccourcis
La descente se fit en seconde, en jouant sur l’embrayage et le frein arrière. Je ne dis pas que c’était facile, mais tellement soulagé d’avoir atteint le sommet, que le retour fut pris avec beaucoup moins de stress. En montagne, il y a toujours une voie classique, et des petits raccourcis.

À chaque fois que je tourne la tête pour regarder si l’un de ces raccourcis est envisageable, j’ai mon copilote qui ne hurle : « pas d’excès de confiance ! » Et c’est ainsi que nous sommes arrivés sains et saufs au campement.

Avant d’attaquer une autre concentration moto, ou pourquoi pas une hivernale, nous comptons bien refaire l’an prochain La Stella Alpina. Je pense que c’est une belle occasion pour nos essayeurs de Moto Magazine de tester des machines polyvalentes, route et tout-terrain, comme la jolie Multistrada présente dans le numéro de juillet-août, la Moto Morini qui mérite d’être mieux connue, ou d’autres. En fidèle lecteur et passionné, j’espère bien vous y retrouver !

Lionel

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