Mercredi 23 avril, circuit de karting d’Escource dans les Landes. Guillaume Antiga, l’instructeur, a l’air frais, mais quand on lui demande, il irait bien faire une sieste. Et pour cause : il vient d’enchainer une 4è place Stocksport aux 24 H du Mans, une descente dans le sud de la France et deux stages de pilotage. Respect !

L’auvent du circuit d’Escource a sauvé la mise aux stagiaires sous la pluie !

Il pleut depuis ce matin sur le circuit de karting d’Escources, la base d’entrainement d’un certain Lucas Mahias, pilote en Mondial Supersport pour le team GMT 94. Car ce tracé de 1400 M est à la fois rapide, varié et technique. Mais aujourd’hui, c’est quasiment du cours particulier, puisque seuls quatre stagiaires se partagent la piste. Deux petits jeunes armés de leurs machines personnelles, des Ovahle 150 cm³ 4T chaussés de pneus pluie.

« La ptite rideuse » sous la pluie avec son Ovahle. Propre, le style !

Les Ovahle sont utilisées en championnat du monde MiniGP, soit la toute première marche d’accès aux GP. Ces petits monos 4T Chinois d’une douzaine de chevaux permettant de s’initier en douceur. « Pour mon école de pilotage, j’ai choisi des ZFM 150 Yam 4T car ils sont à la fois plus fiables et performants » explique Guillaume. Et c’est justement sur ces petits bolides que sont juchés les deux autres participants du stages qui sont eux des adultes.

Julian et Bastien, les crapauds sur leurs boites d’allumettes. Gaz !

Julian et Bastien, nos deux gaillards adeptes de la piste. Respectivement agés de 36 et 43 ans, ils évoluent habituellement au guidon de leurs sportives sur les circuits de Pau et Nogaro. Yamaha R6 pour Julian, Yamaha R3 et bientôt Triumph 675 Daytona pour Bastien. Mais aujourd’hui, c’est en position crapaud sur une boite d’allumettes que les duettistes attaquent la piste. En tant que spectateur, ça peut prêter à sourire, mais après dix ans d’expérience sur circuit, je peux témoigner que cette forme d’entrainement est tout à fait efficace.


Tare congénitale

C’est en début d’après-midi que je rejoins la troupe sous le petit auvent du circuit d’Escource, qui protège pilotes et instructeurs de la pluie. « On va commencer par un peu de roulage libre, je vous filme à la Go Pro et je vous corrige » explique Guillaume. Premier bon point. Sur ce stage de 200 euros à la journée, location de machine incluse, pas d’étude virage par virage, mais au contraire un maximum de roulage, pour que les élèves ne se sentent pas frustrés et progressent.

Guillaume s’assure du bon placement des élèves en leur pointant la bonne traj sur piste

Pendant que je prends des photos depuis le bord de piste, Guillaume observe à l’intérieur des virages. Au bout d’un quart d’heure, premier retour au stand, et première bordée de conseils avec le support de la vidéo. Les caméras étant embarquées, Guillaume se sert de son écran pour corriger ses élèves. Les arrets sur image permettent de bien détailler les conseils. Les élèves pilotes peuvent détailler leur position sur la moto et leurs trajectoires, ce qui vaut mieux qu’un long discours.

En rouge, la traj empruntée par le stagiaire. En bleu, celle qui permet une accélération optimale. Pas simple à deviner !

« Julian, travaille ta précision de trajectoire et n’hésite pas à utiliser toute la piste. Ton genou doit être sur le vibreur, pas 50 cm à côté, sinon tu perds du temps. » « Bastien, dans cet enchainement, tu n’es pas sur la bonne traj, donc en sortie, ta moto n’est pas correctement placée pour te permettre d’accélérer. Bossez ça. Pour cette seconde série de tours, je vais monter dans la tour de chronométrage afin de vous observer. »

Bastien, OK dans les gauches

Les élèves repartent pour un quart d’heure, tandis qu’il s’est arrêté de pleuvoir. Vu d’en haut, les mini-motos trajectant au mieux sur cette piste séchante décrivent un joli ballet. Nouvel arrêt au stand, et Bastien grimace. « Putain, j’y arrive pas ! Je me traine, et j’ai la cuisse droite dure comme du bois ! » « Regarde, je vais te montrer pourquoi » explique Guillaume sans se départir de son calme.

Il dégaine à nouveau son écran et fait un gros plan sur Bastien, vu de dos ce coup-ci, grace à la GoPro de Julian. « Si tu vois le logo Dainese au milieu de ta combarde, tu remarqueras qu’il est est décalé côté gauche, ce qui prouve que tu déhanches suffisamment vu que tu as au moins une fesse sortie. » Avance rapide jusqu’au droite suivant.

Bastien bloqué dans les droites, à l’écran lors du debrief

« Là regarde, tu es droit comme un i sur la moto, et tu ne déhanches pas. La moto ne risque pas de tourner. » Bastien n’en crois pas ses yeux. « Ma parole, mais je ne m’étais jamais aperçu de ça ! » Je regarde Bastien en rigolant. « Tu vois, si tu étais à 200 km/h à Nogaro, tu ne t’en serais jamais aperçu. D’une part parce que toute ta concentration aurait été absorbée par le fait de rester sur la piste. Et d’autre part, c’eut été une excellente opportunité de te bourrer ! »

Autre recette efficace : les cônes pour matérialiser la trajectoire

Le bougre ne m’a pas attendu pour ça, et s’est déjà reveillé une paire de fois en slip dans l’ambulance en direction de l’hopital de Pau après un spendide highside. Au point que son pote photographe Xavier Bourges l’a baptisé « le Pape », l’homme qui embrasse le bitume à chaque sortie. Mais le fait est que Bastien à l’attaque, puisqu’armé de son vieux GSX-R 600 et de sa technique de pilotage approximative, il était en 1.28 à Pau avant de s’envoler. Il n’en fallait pas plus pour sélectionner l’intrépide « Bastos » dans le team Moto Magazine qui s’alignera cette année au Bol d’Argent sur Triumph 765 Daytona en compagnie du pilote et journaliste Zef Enault.

Bastien commence à se débloquer à droite

Sentant la pression monter, Bastien a pris le taureau par les cornes, et décidé de se former comme les vrais pilotes. Et bien lui en a pris ! Mais le voici donc interdit devant son quadriceps d’acier. La faute à une tare congénitale : le refus d’obstacle dans les virages à droite. « Allez, on reprend la piste » signale Guillaume. « Et tu me soignes ta position Bastien. »


Le déblocage du cerveau

Guillaume s’assure du bon placement des élèves en leur pointant la bonne traj sur piste

Ce coup-ci, je ne fais pas le malin non plus, vu que Bastien, photographe de surf professionnel dans le civil, m’a prêté son matos. Un boitier Canon muni d’un objectif 70/200 et d’un multiplicateur qui vaut la bagatelle de 10 000 euros. Armé de ma longue vue, je tente d’immortaliser Bastien en shootant Bastien en séquence. Et m’aperçois rapidement que j’arrive à cadrer à peu près tout sauf la moto ! Pas facile d’exploiter du matos de pro.

Bastien louche sur le point de corde. N’essayez pas ça chez vous

Cela dit, en limitant les séquence à des rafales de quatre ou cinq images, je finis par choper Bastos, dont l’attitude sur la moto s’améliore à vue d’oeil. Au point qu’il commence même à faire le con, et passe devant moi en louchant comme un âne. Quelle truffe ! Je me marre. Mais que ce soit dans le droite serré qui commande la ligne droite de retour, ou dans la parabolique qui revient vers la ligne d’arrivée, Bastien est maintenant bien positionné. Son corps emmène la machine vers le point de corde, qui prend naturellement plus d’angle, en même temps que sa vitesse de passage progresse.

Alors que les trois autres pilotes sont rentrés au stand, Bastien continue à faire des ronds pendant dix minutes, avant de se rendre compte qu’il est seul en piste, et de rejoindre l’écurie. « J’étais parti pour rouler toute la nuit ! » sourit-il en enlevant son casque. « Ca va mieux ! » « Effectivement » confirme Guillaume. « Et tu vas voir que demain sur le sec, ça fera encore plus de différence. » Le lendemain soir, Bastien me rappelle : « C’est un truc de fou ! On est retourné aujourd’hui avec Julian à Escource, et ce coup-ci je roulais avec ma R3. Sur le sec, je force moins et je vais plus vite, c’est génial. J’ai roulé en 1.02, et ai même pu suivre un petit jeune qui court, et qui était coude par terre dans tous les virages. Il faisait le spectacle celui-là ! ». CQFD. Que votre objectif soit de découvrir le sport moto en amateur ou de vous initier à la compétition, la mini-moto sur circuit de karting, c’est la bonne solution.

Après le run, la fin du débrief en face à face permet de faire le point sur les progrès accomplis et ce qu’il reste à travailler

A condition d’être d’abord encadré par un pro comme Guillaume qui vous donnera les bons conseils et vous évitera de vous envoler les bras le long du corps, ce qui ne fait jamais du bien. « La prochaine fois, faut que tu viennes rouler avec nous, tu nous en diras des nouvelles ! » conclue Bastien, excité comme une puce. Certes. Et dans ce second épisode, nous vous détaillerons le nécessaire du parfait pistard débutant, avec le prix de l’équipement d’occase. Bonne route, et à bientôt sur le site de Motomag.

Adresses utiles :

https://www.antigadrivingschool.com

https://kartlandes.com/

Publicité

Commentaire (0)