Le 11 mai à Paris, c’était réunion plénière du Conseil national de sécurité routière (CNSR). Une longue matinée, durant laquelle les experts et observateurs réunis au sein de cette instance relancée par Manuel Valls en 2012 émettent des propositions qui sont ensuite auscultées par les services du ministre de l’Intérieur, avant de finir (ou non) en mesures sonnantes et trébuchantes touchant concrètement les usagers de la route.

Nous détaillons ici celles qui pourraient toucher les conducteurs de motos et scooters.

Équipement : vêtements visibles
La commission 2-roues et 2-roues motorisé (2RM) du CNSR, présidée par Patrick Jacquot, représentant du Groupement des entreprises mutualistes d’assistance (Gema) mais aussi Pdg de la Mutuelle des Motards, a émis des propositions dans un contexte assez favorable : le nombre de motocyclistes tués sur la route a diminué de 11 % depuis 2010. Cette commission oriente ses préconisations vers la prévention et l’éducation, et non vers la répression ou l’obligation.

A propos de l’équipement des motards et scootéristes, sur lequel tous les spécialistes se rejoignent pour dire qu’il est indispensable mais hélas insuffisamment porté, notamment chez les scootéristes, le CNSR préconise :
- d’inciter les usagers au port de vêtements visibles ;
- de multiplier les campagnes d’information concernant le port de tous les équipements de protection individuelle, à l’instar de l’opération Pack Protection lancée par divers acteurs économiques, offrant la possibilité aux usagers de 2RM de s’équiper à moindre frais.

Et, pour une meilleure visibilité dans la circulation :
- de sensibiliser les usagers de 2RM à mieux signaler leur présence et se positionner par rapport aux autres usagers, pour éviter les effets de surprise et faciliter les interactions ;
- de sensibiliser les autres usagers, en particulier les automobilistes, sur la détection de l’éventuelle présence d’usagers vulnérables, pour éviter les effets de surprise et faciliter les interactions.

Avis défavorable au contrôle technique
Sur demande du président du CNSR, sa commission 2-roues a planché sur l’utilité d’un contrôle technique obligatoire pour les motos et scooters, en termes de sécurité. Elle s’est prononcée en défaveur de cette idée, qui revient régulièrement dans les débats, au CNSR comme au ministère, malgré la décision de l’Union européenne de reporter à 2022 cette éventualité dans tous les pays du Vieux Continent.

Pas d’adhésion à la plaque avant
Dans la même logique, après discussion, la commission 2RM a refusé de proposer une obligation d’installer une plaque d’immatriculation à l’avant des motos et scooters, mesure là encore remis au centre des discussions par des participants au CNSR. Le docteur Philippe Lauwick, président de la commission Alcool, Stupéfiants, Vitesse du CNSR, se prononce par exemple en faveur de cette mesure.

Préoccupation sur les infrastructures routières
La commission Infrastructures routières du CNSR a proposé des actions destinées à réduire le nombre d’accidents imputables à la construction et à l’aménagement des chaussées :
- rendre obligatoire des diagnostics de sécurité des routes pour l’ensemble des réseaux principaux.
- planifier leur aménagement et leur entretien en prenant en compte la sécurité de l’ensemble des usagers et tout particulièrement les plus vulnérables (piétons, cyclistes, cyclomotoristes, motocyclistes).

Formation : mise en place du continuum éducatif
La commission Formation du CNSR recommande la mise en œuvre d’un Continuum éducatif du citoyen usager de la route (Cecur), dans un premier temps pour la catégorie B du permis de conduire. Ce cursus apporterait « une progressivité vers la validation du permis de conduire, l’examen pratique devenant une étape de la formation », selon Gérard Acourt, président de la commission, qui est aussi représentant du groupe Ecole de conduite française (ECF).

Ce Cecur se décomposerait en deux phases : avant la passation de l’examen, le suivi d’ateliers de gestion des risques ; après l’obtention du permis de conduire : le suivi de rendez-vous d’expériences post-examen durant une phase d’autonomie post-probatoire.

Le délégué interministériel de sécurité routière, Emmanuel Barbe, présent à la réunion du CNSR, a toutefois mis en garde sur les moyens que nécessiterait une telle mesure.

Identification du conducteur, traçabilité
Autres propositions du CNSR, celles émanant de la commission Alcool, stupéfiants, vitesse, qui souhaite « une égalité entre citoyens face au contrôle sanction ». Comment ? « En facilitant l’identification du conducteur lorsqu’une infraction est relevée avec un système de contrôle sanction automatique (vitesse, feu rouge, passage à niveaux) afin d’éviter que celui-ci ne puisse échapper à tout ou partie des sanctions encourues ».

Les véhicules d’entreprise et de location sont visés par la proposition suivante :
- obligation, assortie d’une sanction dissuasive pour les personnes morales, d’assurer la traçabilité temporelle des conducteurs sur leur parc de véhicules.

Identification du conducteur, traçabilité… L’objectif de ces mesures, si elles étaient appliquées, serait clairement d’accentuer la répression sur les conducteurs, via des moyens de contrôle et de surveillance dissuasifs mais, sans doute, restreignant la liberté de circulation.

Traquer les motards qui échappent aux radars
Cette commission souhaite également réduire le nombre de contraventions qui ne parviennent pas à leur destinataire ; s’ils ne sont pas nommément désignés, les motards sont clairement visés par les deux propositions suivantes :
- favoriser la mise en place des améliorations techniques et réglementaires pour permettre la parfaite lisibilité des plaques des véhicules lors des contrôles sanctions automatisés de vitesse ;
- développer les contrôles de vitesse « double face » (ou à défaut « en éloignement ») afin d’améliorer le taux de lisibilité des plaques et l’identification des conducteurs.

Éducation et prévention d’un côté, répression de l’autre… Il reste à savoir ce que le ministère de l’Intérieur fera de ces mesures. Pour l’année 2015, le ministre a déjà fixé les priorités, le 26 janvier dernier.

Il concernant les motards, il vient d’instaurer l’obligation de détenir un gilet jaune ; mais aussi, l’expérimentation de la limitation de vitesse à 80 km/h sur trois routes du réseau secondaire. La suite viendra au début de l’été, avec notamment l’interdiction des systèmes de téléphonie dotés d’oreillettes.

Et vous, que pensez-vous de ces propositions du CNSR ? Réagissez en postant un commentaire à cet article.

À lire sur les mesures de la Sécurité routière

- Le gilet jaune obligatoire dans les motos et scooters à partir de 2016
- 80 km/h : trois routes secondaires en test pendant deux ans
- Contrôle technique et équipement obligatoire en discussion à la Sécurité routière
- Conseil national de sécurité routière : la FFMC reste vigilante

Publicité