Dès 1971, Lamborghini a dû faire face à de nombreuses difficultés économiques - notamment liées au choc pétrolier de 1973 - qui l’obligeront à des concessions drastiques : revente de sa production de tracteur au groupe italien SAME et annulation d’un contrat prometteur avec BMW pour sa M1. Cette décennie tumultueuse poussera d’ailleurs Ferruccio Lamborghini, le fondateur de la marque, à quitter l’entreprise en 1974.
Lamborghini était en charge de concevoir le châssis tubulaire de la BMW M1
(DR photo - Mr Choppers)
Placée en liquidation judiciaire en 1980, Lamborghini est sauvée de la banqueroute par les frères Mimran. Après une année passée à redresser la barre, ces acquéreurs fortunés issus de l’industrie agroalimentaire ont des projets plein la tête pour l’avenir de la firme. Ainsi, ils adaptent le V12 de la Lamborghini Countach sur des bateaux de courses « offshore » et conçoivent le 4x4 LM002, lui aussi motorisé par le V12 de 450 ch (!).
À ce train-là, pourquoi pas une moto ?
La moto Lamborghini Design 90 était franco-japonaise
Pour concevoir ce que l’on pourrait nommer la « Countach de la moto », Lamborghini fait appel à la célèbre entreprise toulousaine Boxer Bikes - qui deviendra par la suite Boxer Design - spécialisée dans la préparation et le prototypage moto. Les Français, réputés pour l’originalité de leur coup de crayon, ont bien des atouts pour être en symbiose avec l’audace des lignes de la firme italienne.
La Kawasaki Spartacus (1994) basée sur une ZXR 750, l’une des nombreuses préparations de Boxer Bikes
Avec Thierry Henriette au design (qui travaillera plus tard sur la VB1, « Voxan Boxer n°1 »), c’est l’ingénieur et pilote moto Claude Fior qui met les mains dans le cambouis pour édifier ce qui sera la première moto de la firme de Sant’Agata en 1986 : la Lamborghini Design 90.
Pour ce faire, il récupère une Kawasaki GPZ 1000 RX de 125 ch et 267 kg tous pleins faits. La carrosserie de fibre de verre est sculptée sur mesure, avec un réservoir forgé en aluminium. Des jantes 3 branches de la marque Gotti sont montées, tandis que le cadre de la Kawa est lui aussi modelé en aluminium pour l’alléger au maximum. Un coup de maître pour le prototypiste qui aurait réussi à réduire le poids de la machine à environ 170 kg à sec.
La moto est aussi équipée d’une ligne d’échappement - elle aussi sur-mesure - et de freins Brembo. Avec une conception aérodynamique optimisée - voyez les prises d’air sur les carénages latéraux - la vitesse de pointe revendiquée est de 260 km/h. Au vu de cette fiche technique, la franco-italo-nipponne placée sous le signe du taureau italien n’a pas été pas conçue pour faire rire les GSX-R et autres CBR, vedettes incontestées de l’époque.
Trop chère, trop exclusive
Vendue 13 500 $ (12 500 €) - une somme astronomique pour l’époque - les cinquante exemplaires produits eurent beaucoup de mal à trouver preneurs. En dépit de son rapport poids/puissance d’exception et de son design typiquement 80’s, on peut aisément comprendre qu’une GPZ 900 R - chevauchée la même année par Tom Cruise dans Top Gun (dont le 2e opus, toujours en Kawa, serait dans les tuyaux) - semblait un choix plus pertinent pour le commun des mortels.
Seulement quelques exemplaires auraient été vendus au prix fort, peu avant le rachat de la firme par Chrysler en 1987. Certains de ces 50 modèles produits apparaissent parfois sur des sites d’enchères de véhicules de collection.
Crédit photos : Lamborghini, Boxer Design, bikeexif.com, rideapart.com, jameslist.com