Vous pourrez retrouver une analyse complète du positionnement des candidats à la Présidentielle, sur la moto et suite à leurs réponses, dans le n°236 de Moto Magazine (avril 2007).

Ségolène Royal (PS)

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PRISE EN COMPTE DES DEUX-ROUES À MOTEUR (2RM) : MOTOS ET SCOOTERS

CIRCULATION PLUS FLUIDE
Le nombre de deux-roues motorisés (2RM) est en forte croissance en ville et contribue à améliorer les conditions de circulation. Etes-vous d’accord avec cette affirmation ?

« Oui sans doute.
Oui, cependant s’il est important d’améliorer les conditions de circulation il nous faut aussi contribuer à réduire la pollution atmosphérique et faire mieux partager l’espace public entre tous les usagers : voitures, deux roues motorisées, cyclistes, piétons... En zone urbaine il y a une très forte densité d’usagers sur la voirie et donc, un risque élevé d’accidents. Si le nombre de deux-roues motorisés dans la circulation a augmenté, d’un point de vue accidentologie, les deux roues représentent une majorité des blessés et des morts. Il est nécessaire d’aménager l’espace public, là où c’est reconnu comme nécessaire afin de sécuriser au mieux les déplacements de toutes les catégories d’usagers.

STATIONNEMENT
Le nombre d’emplacements de stationnement en ville est notoirement insuffisant. Etes-vous favorable au stationnement des 2RM sur les trottoirs larges, sous certaines conditions (ne pas gêner les piétons, les personnes handicapées, les poussettes) ?
Que proposez vous ?

« Absolument pas.
Autoriser les 2RM à stationner sur les trottoirs larges pose plus de problèmes qu’il n’apporte de solutions, car cette autorisation serait un facteur d’insécurité juridique, et donc source de contentieux. En effet, quelles sont les dimensions d’un trottoir « large » ? A partir de quand un 2RM commence-t-il à « gêner le passage » des piétons, des personnes handicapées et des poussettes ? Il faut des règles claires et non ambiguës, applicables de façon indiscutable tant par les usagers que par les agents chargés de verbaliser. Plutôt que ce pis-aller, je pense qu’il faut surtout développer et accroître le nombre d’emplacement de stationnement en ville pour les 2RM. »

CIRCULATION EN VILLE
Des expériences menées à l’étranger sur la circulation des 2RM dans les couloirs de bus concluent à une amélioration de la circulation, et de leur sécurité. Etes-vous favorable à une telle mesure dans les villes françaises ?

« Plutôt non.
Les expériences tentées sur des axes très circonscrits de certaines grandes villes, comme à Londres, ne se sont pour l’heure pas révélées très concluantes. D’autant qu’il faut veiller à ce que l’amélioration de la sécurité des motards ne s’opère pas aux dépens de celle, par exemple, des cyclistes, qui ont le droit d’emprunter les couloirs de bus. »

CIRCULATION ENTRE LES FILES
De même, êtes-vous favorable à légaliser, comme le propose la FFMC sous certaines conditions, la pratique de la circulation entre les files de voitures par les 2RM, sur les voies rapides embouteillées ?
Que proposeriez-vous comme alternative ?

« Plutôt non.
Je suis favorable à une expérimentation du droit des motards à remonter les files de voitures, de façon à ce que nous étudiions s’il est possible de donner un cadre légal à cet usage, tout en assurant une bonne sécurité des motards et des automobilistes. Les propositions de la FFMC sur le sujet, notamment la charte de bon comportement, pourraient servir de base à cette expérimentation. N’oublions pas que les principales causes d’accident des deux roues motorisées sont leur vitesse excessive et les changements intempestifs de file des quatre roues. Il faut accentuer les campagnes de sensibilisation pour que chacun se responsabilise, respecte les autres et adopte un comportement adapté et conforme au Code de la route.

DISPOSITIONS FISCALES ANTIPOLLUTION
Les constructeurs ont réalisé de grands progrès, qui permettent aux 2RM récents de respecter l’environnement. Etes-vous favorable à la création de mesures fiscales pour encourager le renouvellement rapide du parc circulant vers des véhicules aux normes Euro 3 ?
Quel type de mesure proposez-vous ?

« Oui absolument.
De telles mesures vont dans le sens de l’excellence environnementale dont j’ai fait l’une des priorités du Pacte présidentiel que je propose aux Français. Elles pourront prendre la forme d’une incitation reposant sur la pénalisation fiscale des véhicules les plus polluants. »

AMENAGEMENTS ROUTIERS
Les 2RM évoluent dans un environnement essentiellement conçu pour l’automobile. Rendrez-vous obligatoire la prise en compte des 2RM dans la conception des routes (mobilier urbain, peintures au sol, obstacles latéraux) ?
Quelles seraient vos priorités ?

« Oui absolument.
C’est dans le domaine des obstacles latéraux, décriés à juste titre par les motards comme extrêmement dangereux en cas d’accident, que l’effort devra porter en priorité. Pour ne prendre qu’un seul exemple, pour la sécurité des conducteurs de 2 roues motorisés, il est nécessaire de remplacer les glissières métalliques par des murets en béton. »

IMAGE DES MOTARDS
Une réputation détestable est souvent attribuée aux motards. Pensez-vous que cette idée soit fondée ?

« Plutôt non.
Il est exact qu’un certain discours a tendance à stigmatiser les motards comme dangereux ou irresponsables. Ce discours me semble profondément injustifié. Les motards sont très conscients de leur vulnérabilité sur la route, et donc généralement plus sensibles aux impératifs de la sécurité routière que beaucoup d’automobilistes, bien à l’abri derrière la carrosserie de véhicules désormais garnis de multiples équipements de sécurité. Cela se retrouve dans le constat que, dans plus de la moitié des cas, les motards ne sont pas la cause des accidents dans lesquels ils sont impliqués. »

VOTRE POLITIQUE DE SECURITE ROUTIERE

PERMIS DE CONDUIRE
Nombre d’accidents ont lieu par méconnaissance des spécificités des véhicules avec lesquels nous partageons la route (poids-lourds, deux-roues à moteur, vélos).
Seriez-vous prêt à intégrer au permis de conduire un module spécifique sensibilisant tous les conducteurs aux particularités des 2RM et à leur fragilité en particulier ?

« Oui absolument.
Effectivement il est nécessaire lorsque l’on passe son permis de conduire de mieux comprendre ce que d’autres usagers de la route voient ou ne voient pas. Cela est vrai pour les conducteurs de voitures comme pour les motards... Inclure un module à la formation est une idée que je retiens. »

TVA SUR LES EQUIPEMENTS DE SECURITE
Le port du casque est obligatoire, et constitue un élément de sécurité incontournable. En Grande-Bretagne, la TVA sur les casques est par conséquent de 0%.
Seriez-vous enclin à baisser la TVA sur les casques et les protections homologuées ?

« Plutôt non.
Je connais cette revendication de la FFMC. Mais si l’on baissait la TVA sur les casques, il n’y aurait pas de raison qu’on ne le fasse pas aussi pour les cyclistes et les rollers, de même que, dans les voitures, sur les airbags et les ceintures de sécurité. Vous voyez qu’il faut, pour s’engager dans cette voie, disposer de marges de manœuvre budgétaires, qui manquent aujourd’hui. Et puis la TVA comme l’impôt en général c’est pour l’Etat des moyens en faveur d’investissements tant dans la recherche appliquée aux motorisations propres que pour le développement de l’éducation à la sécurité routière... »

FEUX DE JOUR
L’invitation faite aux automobilistes de rouler en feux de croisement le jour noyait les deux-roues dans le trafic, alors que le phare allumé permet de les distinguer. Cette mesure n’a été suivie d’aucun effet positif. La Commission Européenne prévoit néanmoins de rendre obligatoires les feux de jour sur les voitures par construction, en dépit des dangers que cela fait peser sur les usagers vulnérables (piétons et deux-roues) qui seront moins visibles.
Défendrez-vous ce point de vue ?

« Plutôt non.
Je n’ai pour ma part pas été convaincue de l’impact déterminant de cette mesure sur la sécurité, et je pense d’ailleurs qu’il faut veiller à protéger en priorité les deux roues, véhicules les plus vulnérables. Je pense qu’il faudrait généraliser l’allumage du phare pour tous les deux-roues. »

PROGRAMME SCOLAIRE
La sensibilisation à la conduite et aux risques routiers à l’école se limite aujourd’hui à un questionnaire pour l’obtention de l’Attestation Scolaire de Sécurité Routière (ASSR), et à 5 heures de formation pour le Brevet de Sécurité Routière (BSR). C’est insuffisant. Etes-vous favorable à une formation plus élaborée à l’école ?
Que proposez-vous ?

« Oui absolument.
A l’école, dès le plus jeune âge, une heure par mois pourrait être consacrée à enseigner aux élèves la sécurité routière et une meilleure connaissance de l’espace public, afin que ces notions deviennent très vite, pour les enfants, des habitudes qu’ils n’auront aucun mal à perpétuer une fois devenus adultes. En matière de sécurité routière, il n’y a pas que la répression, l’éducation est le vecteur principal du changement de comportement que nous souhaitons.
« 

RADARS ET AUTOMATICITE DES SANCTIONS
Les sanctions automatisées, aboutissant au cumul d’infractions mineures, conduisent des milliers de conducteurs à rouler sans permis. Comment comptez-vous régler ce problème ?
Pensez-vous que les problèmes de sécurité routière peuvent être résolus par la multiplication des radars automatiques ?

« Oui absolument.
Je m’en remets aux statistiques : les deux premières causes de mortalité sur les routes sont l’alcool et la vitesse. Or l’implantation des radars automatiques a conduit les conducteurs à lever le pied. Je pense donc qu’il s’agit d’une bonne mesure. J’ajoute que le fait que des milliers de conducteurs roulent sans permis n’est pas un argument recevable : ce faisant, ils continuent de se placer hors la loi, après avoir été sanctionnés, précisément, pour ne pas avoir respecté la loi. En ville une majorité de conducteurs avouent rouler à plus de 65 km/h alors que la vitesse est limitée à 50, c’est aussi en zone urbaine que le nombre de tués et de blessés a augmenté notamment chez les deux roues motorisées. Le respect du code particulièrement des limitations de vitesses c’est autant de vies épargnées, c’est une idée à laquelle les conducteurs des deux roues motorisées doivent adhérer pour leur propre sécurité. »

CIRCUITS
Des circuits de vitesse permettent de pratiquer la moto dans des conditions de sécurité optimales et peuvent être utilisés pour la formation. Encouragerez-vous leur développement en facilitant l’accès du plus grand nombre à ces infrastructures ?

« Oui sans doute.
Je suis favorable au développement de ces circuits, mais je dois souligner que cette question relève de la compétence des collectivités locales. »

CONTROLE MEDICAL
La conduite d’un véhicule à moteur exige une vigilance, une vision et des réflexes d’un bon niveau. Pensez-vous qu’il faille vérifier régulièrement l’aptitude à la conduite ?
Si oui, quel type de tests proposerez-vous ? A quelle périodicité ?

« Oui absolument.
Il est frappant que la notion de « jeune conducteur » soit prise en compte dans notre société, que ce soit en termes de limitation particulière de vitesse ou de primes d’assurances, mais que rien ne soit prévu pour les conducteurs qui perdent leurs réflexes, que ce soit en raison de leur âge ou d’une pratique de la conduite trop sporadique. Dans un premier temps, il me semble qu’un examen de contrôle de la conduite pourrait être proposé à partir d’un âge qui reste à déterminer dans le cadre d’une concertation avec les usagers. »

PREVENTION
La politique de sécurité routière actuelle, axée quasi-uniquement sur la répression, infantilise et aigrit les usagers de la route, et atteint ses limites.
Un volet prévention visible du grand public est-il prévu au sein de votre programme sécurité ?
x Oui x Non
Quelle est la nature de ce volet prévention ?

« Oui.
Je pense le plus grand bien, sur ce sujet, de la proposition faite par la FFMC d’organiser à nouveau à destination du grand public des campagnes sur les bons comportements routiers, en mettant l’accent sur la notion de responsabilité individuelle des conducteurs. »

LIBERTE DE CIRCULER : VOS PRIORITES

PEAGES URBAINS ET SUR NATIONALES
Du fait des lois de décentralisation, et de la privatisation du domaine public, de nombreux projets routiers, comme des nationales et des autoroutes urbaines, seront financés par le péage. Y êtes-vous opposé ?

« Plutôt non.
Je ne suis pas opposée à ce que des sections de voirie routière soient payantes, à la triple condition que ces sections soient limitées, que le montant des péages soit encadré et que des itinéraires alternatifs gratuits demeurent à la disposition des usagers qui ne souhaiteraient pas emprunter ces sections. »

ROUTES INTERDITES AUX MOTOS
Le tunnel A86 entre Rueil (Hauts-de-Seine) et Versailles (Yvelines) sera interdit aux motos. Etes-vous favorable à cette discrimination qui crée un précédent dangereux sans justification valable ?

« Plutôt non.
Ce tunnel est très particulier, puisque deux niveaux de circulation indépendants s’y superposent, dans un sens et dans l’autre, ce qui est, en soi, un gage de sécurité. Par ailleurs, la circulation y sera limitée à 70 km/h. Si ses dimensions ne permettent pas aux camions de l’emprunter, tel n’est pas le cas pour les motos. Si je suis élue, je demanderai au Gouvernement de considérer ce dossier, qui, apparemment, n’a été pour l’heure examiné que par Cofiroute. »

LOI SUR LES "100 CHEVAUX"
Actuellement, la France est le seul pays au monde où les motos sont bridées à 100 ch, sans fondement. C’est contraire aux principes énoncés dans les traités européens. Abrogerez-vous cette mesure ?

« Absolument pas.
Cette mesure n’est absolument pas contraire aux traités, qui laissent aux Etats membres, en ce domaine, une marge de décision, en vertu du principe de subsidiarité. »

LIMITATION DE VITESSE PAR CONSTRUCTION
Etes-vous favorable à empêcher la conception de véhicules permettant le dépassement des vitesses autorisés ?

« Plutôt non.
La priorité demeure celle de l’amélioration de la sécurité, d’une éducation des conducteurs et du respect des réglementations. »

DISPROPORTION FAUTES/SANCTIONS
La lutte contre l’insécurité routière a multiplié le nombre de lois et durci les sanctions. Par exemple, revendre une moto ayant subi des modifications, même mineures, expose à une amende de 30 000 € et 2 ans de prison. Allez-vous poursuivre dans ce sens ?
Que proposez-vous ?

« Oui sans doute.
Depuis la loi de 2003 sur la lutte contre la violence routière, l’article L. 317-5 du code de la route sanctionne effectivement le fait de gonfler un moteur au-delà de la puissance maximale autorisée. Je suis favorable à cette mesure dans son principe. En effet, la sécurité d’une moto "bricolée" n’est pas toujours garantie, sans compter les nuisances sonores que ces bricolages entraînent souvent. En outre, quelle serait l’efficacité d’une réglementation qui bride la puissance des motos s’il était possible de la contourner sans risque d’être sanctionné ? Chaque règle doit exposer le contrevenant à une sanction : telle est mon approche, en ce domaine comme dans tous les autres. »

CONTROLES TECHNIQUES
Les études montrent que les accidents de 2RM ne sont pas dus à une défaillance technique du véhicule, mais surtout à des facteurs humains. Envisagez-vous malgré tout la mise en place d’un contrôle technique moto ?

« Oui absolument.
C’est vrai, la plupart des accidents impliquant des motards sont rarement liés à l’état même de leur moto. Cela s’explique dans doute par cette culture toute spécifique que l’on rencontre traditionnellement chez les motards, qui veut que la plupart soient attachés à leur moto et qu’ils en prennent soin. Toutefois, l’utilisation des 2RM connaît un tel essor que nombreux sont les nouveaux conducteurs qui n’ont pas cette culture et utilisent leur moto comme un simple moyen de se déplacer, surtout en ville. Une vigilance est donc nécessaire sur le bon état des véhicules. »

RELEVES D’ADN POUR CAUSE D’ACTION MILITANTE
Le relevé d’empreintes ADN était jusqu’ici réservé aux criminels. Mais on constate une montée en puissance du fichage ADN pour des infractions mineures, ou pour sanctionner des actions militantes. Êtes-vous favorable au développement du fichage ADN ?

« Absolument pas.
Le fichage ADN doit être circonscrit aux criminels, je pense en particulier aux meurtriers ou délinquants sexuels. C’est pour cela qu’il a été conçu et développé. En raison des risques de dérives, je ne suis absolument pas favorable à son extension pour des infractions mineures et pire pour envisager des sanctions à l’encontre d’actions militantes. »

VIDEOSURVEILLANCE
On note une multiplication des outils de surveillance électronique pour constater des infractions routières. Vous engagerez-vous à limiter leur usage ?

« Absolument pas.
Une infraction demeure une infraction, et je pense qu’il faut combattre le « pas vu pas pris », car en matière de sécurité routière, ce sont des vies humaines qui sont en jeu. Je suis en revanche opposée à ce que, sous couvert de repérer les infractions routières, les dispositifs de vidéosurveillance soient utilisés à d’autres fins. C’est une question de liberté publique. L’usage de ces dispositifs doit donc être fortement encadré.
 »

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