Elle permet aussi (mais faut-il encore le répéter ?) une grande liberté de mouvement et la possibilité de sortir des sentiers battus par les touristes. Attention toutefois au réseau routier turc, car bien qu’immense et goudronné, il n’est pas comparable au nôtre. On y trouve d’autres façons de conduire, d’autres codes et d’autres règles. De plus, surtout en Anatolie, les distances sont très importantes et la moyenne peu élevée. Le périple prend alors une allure de « grand voyage ».
Ajoutons que depuis la France, la route pour se rendre en Turquie est longue, avec deux itinéraires possibles : l’un par voie de terre à travers l’Europe de l’Est et l’autre par bateau. Cela demande pas mal de temps et d’argent… Mais cela en vaut largement la peine ! Notre voyage, avec une Honda DN-01 et trois BMW 1200 GS, aura duré en tout quatre semaines.

De l’Adriatique à l’Égée
Aller à moto jusqu’en Turquie n’est pas une simple formalité ! Par la route, c’est en effet un périple de plus de 2700 kilomètres, avec la traversée d’au moins six pays qui vous attend. L’autre possibilité, certainement moins chère si l’on prend en compte toutes les dépenses du voyage, consiste à prendre le bateau à Ancône, en Italie. C’est celle qui a été retenue pour ce voyage aller. En été, il y a bien un bateau direct jusqu’à Cesme avec la compagnie Marmara, mais au mois de mai, date de notre départ, il a fallu prendre trois bateaux pour arriver à Bodrum, au sud d’Izmir. Mais bon, quand on aime la mer…
L’arrivée à Bodrum, petite ville touristique sur le bord de la mer Égée et face à l’île de Kos, n’est pas vraiment dépaysante en soi car le lieu, comme bon nombre de stations balnéaires méditerranéennes, est très touristique et donc à la mode occidentale. Le passage en douane est une pure formalité, et n’y a que les motos qui intéressent les douaniers, à cause de certaines obligations spécifiques (voir encadré « Pratique »).

Après une première nuit passée dans un petit hôtel au bord de la mer, assez loin de Bodrum et de ses paillettes, en route vers la ville d’Antalya et, ensuite, la Cappadoce.
Les possibilités d’itinéraire sont nombreuses, entre routes côtières et montagneuses. Le nôtre consiste à parcourir la côte jusqu’à Fethyie par la route 400, avant de traverser une partie du massif du Taurus par la route 350 jusqu’au parc national de Gulluk et Antalya. Un choix judicieux, car il offre déjà un beau panel de la diversité des paysages turcs. D’un côté, le littoral est par endroits encore vierge, et la forêt de pins vraiment splendide ; de l’autre, dans la montagne, il est possible d’observer un paysage proche de celui que l’on trouve chez nous dans le Mercantour. Mais déjà, une évidence s’impose : le réseau routier secondaire turc est en constante évolution (en Anatolie, c’est encore pire), et bon nombre de routes n’apparaissent pas encore sur la carte routière IGN, pourtant récente et bien détaillée !
Quant au GPS avec carte du pays, il est souvent hors jeu. La meilleure solution consiste à s’orienter en demandant aux autochtones ou, encore mieux, à recourir à un simple GPS avec relevé des points sur la carte.

La Cappadoce et Sanliurfa
D’Antalya jusqu’à Kayseri, la grande ville proche de la Cappadoce et magnifique belvédère sur le massif des Erciyes (4000 m d’altitude), la route 665 qui monte à Beysehir et au lac endoréique (fermé) du même nom est tout simplement magnifique. Plusieurs cols sont au programme. Ensuite, la route 330 en direction de Konya et la 300 jusqu’à Nevsehir (au cœur de la Cappadoce) déroulent leur goudron sur un plateau à plus de 1000 m d’altitude. L’air y est pur, et les villages de plus en plus épars. Dans cette région, il ne reste plus qu’à se perdre au milieu de nombreux sites, plus fascinants les uns que les autres.
Par la suite, vers la Syrie et la très belle ville de Sanliurfa, aux portes du Kurdistan, une belle solution consiste à descendre par Develi et Kozan (route 815). C’est l’un de plus beaux itinéraires du pays si l’on aime les paysages de montagne… et la solitude ! Attention toutefois à la météo, à l’état des routes et à la moyenne en cas de mauvais temps.
On peut aussi rejoindre Gaziantep par la 825 si l’on veut faire plus court. Il faut bien deux jours pour visiter Sanliurfa et Harran. La ville est aussi un bon endroit pour faire une petite révision de la machine, car on y trouve de nombreux mécaniciens moto.

Nemrut Dagi et mer Noire
De Sanliurfa, par la route 360 et avant la ville de Siverek, il est possible de prendre un bac pour traverser le lac du barrage d’Atatürk sur l’Euphrate. De là, il ne reste qu’une centaine de kilomètres (dont 30 de pavés) pour rejoindre l’un des plus beaux sites archéologiques au monde, le Nemrut Dagi. Faute de temps et avec beaucoup de regrets, nous ne nous rendrons pas au mont Ararat, mais nous poursuivons notre voyage vers la mer Noire via l’Anatolie centrale. Au menu : villages, cols, plateaux, vallées étroites, ponts en bois… Les BMW GS, en mal de piste, ont même parfois emprunté des chemins où il fait bon remuer la poussière et traverser les petites rivières. Pour arriver sur le petit port de Sinop, notre tracé passe par les villes de Malatya, Elazig, Divrigi, Sivas et Corum, mais la route n’est pas toujours la plus simple ou la plus logique.

De la mer Noire à Istanbul
Sur la carte, la route côtière n° 10, qui relie les deux ports de Sinop et Amasra, est longue d’environ 350 km et semble bien facile. En réalité, c’est une route étroite et sinueuse au possible. Il aura fallu plus de 10 heures pour effectuer la liaison, souvent avec une météo humide. C’est une route épuisante, dangereuse, mais aussi l’une des plus belles de ce voyage. Contrairement au reste de la Turquie, ici les pompes à essence sont assez rares.
D’Amasra, pour rejoindre au sud l’autoroute Ankara-Istanbul, il faut franchir une chaîne de montagnes par la route 755, un must pour ceux qui aiment le pilotage sans lignes droites. Au passage, ne pas oublier de s’arrêter à Safranbolu pour admirer ses vieilles maisons ottomanes et acheter du safran. L’arrivée à Istanbul depuis la partie asiatique procure exactement l’effet contraire que lorsqu’on arrive d’Europe : le trafic intense donne l’impression d’arriver en Occident. Pourtant, deux journées passées dans les bazars, un bon repas de sardines grillées sur le Bosphore, la majesté de la mosquée Bleue ou une visite dans les jardins du palais de Topkapi suffiront à retrouver le charme incroyable de cette ville, l’une des plus belles au monde.
Quant au retour, il se fera par la route, mais c’est encore une autre aventure…

Villes coup de cœur

- Istanbul
Sans être la capitale (qui est, comme vous le savez, Ankara), Istanbul est la ville la plus magique de Turquie, celle où il faut obligatoirement s’arrêter au moins quelques jours pour s’imprégner de son charme et admirer les vestiges d’un passé très riche. On ne va pas faire ici une liste des monuments ou des lieux à visiter. Pour cela, un bon guide de voyage (Gallimard, le Routard…) fera l’affaire.

Mais sachez que la ville regorge aussi de « petits coins » populaires où il est possible de plonger dans le quotidien des habitants. La rive asiatique est plus authentique, et ses marchés plus colorés.
Le bazar égyptien, malgré l’afflux des touristes, reste un lieu où l’atmosphère de l’Orient est encore palpable. Il fait également bon admirer le trafic des bateaux sur le détroit, regarder les pêcheurs sur les ponts de la ville, se nourrir d’une tranche de pain avec deux sardines grillées… Bref, Istanbul est une ville où se perdre est un délice, une ville à vivre.

- Sanliurfa
Cette cité, située au sud-est du pays à quelques kilomètres de la frontière syrienne, est l’une des plus anciennes du pays et un singulier carrefour de civilisations entre Mésopotamie et Méditerranée.
On y admire des mosquées bien sûr, mais aussi de très belles églises. Dans ses jardins et son bazar, on peut croiser une myriade de gens différents – Turcs, Arméniens, Kurdes, Arabes. Sanliurfa, ville mosaïque…

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