Essai

Jusqu’à présent, en optant pour une autrichienne, on entrait dans un monde de machines à fort caractère, où le pilote était le seul maître à bord. La RC8-R, seule hypersport dépourvue d’assistance électronique, en est le plus bel exemple. Avec la nouvelle Adventure, ce temps est révolu.

Au dire de Paolo, notre guide italien sur cette présentation, le partenaire Bosch – qui a développé l’ABS et l’antipatinage –, prône la vertueuse mission du zéro accident (lire notre dossier p. 64 de Moto Mag de mars 2013). Pour y tendre, la firme utilise les leviers paramétrables : accélérateur, gestion de la puissance et rotation de la roue arrière. Certes, ce n’est pas le premier gros trail à se doter de « gadgets » électroniques, quasiment toutes les rivales en disposent. Mais l’Adventure a poussé le concept encore un peu plus loin.

Sur la version standard, le conducteur peut ajuster le fonctionnement de l’ABS/eCBS (electric Combined Brake System), le freinage combiné et l’ABS de la roue arrière se déconnectant en mode « Off road ». Le pilote a également la possibilité de tout couper. S’agissant de l’antipatinage, les niveaux de réglage sont également nombreux avec un mode « Street » (assez castrateur), un mode « Sport », un « Off road » (qui laisse la roue arrière patiner) et un mode sans aucune assistance. Mais à chaque coupure du contact, tous les réglages se réinitialisent en mode « Street » ou « Sport », selon les motos essayées.

Bienvenue à bord

On retiendra également les efforts de la firme en matière d’ergonomie. De la selle aux pontets tenant le guidon en passant par les repose-pieds et la bulle, tout s’ajuste en fonction des desiderata et de la morphologie du conducteur. Une fois en selle, on note quelques bouleversements. L’ancienne Adventure était une moto haute et fine, il n’en est plus rien. La selle est large, le poste de commande imposant et le silencieux d’échappement dépasse sacrément du côté droit, quand la double sortie de l’ancien modèle se dissimulait le long du bâti arrière. Mais on est bien assis, même si la mousse est encore ferme, et la selle, une fois réglée en position basse (860 mm), permet de poser les pieds bien au sol.

Ça galope !

Un twin de sportive dans un cadre de trail, qu’est ce que ça donne ? Testée en version européenne (comprendre en full), l’Adventure avance, galope même ! Dès les premières accélérations, on comprend également pourquoi Bosch a pondu un système aussi intrusif. Car si le bloc n’est pas hyperdémonstratif à bas régime, surtout face à l’ancien 990 cm3, il révèle tout son potentiel au-delà de 6.000-6.500 tr/min. L’Adventure pousse alors très fort et atteint une vitesse de pointe digne d’une hypersport. À bon rythme, cartographie moteur réglée sur le mode « Sport », l’électronique s’affole rapidement. Aussi, comme le tirage des gaz électronique est lié à un capteur d’inclinaison, l’ordre d’accélérer subit un léger décalage entre le geste et la poussée du moteur.

Une situation vite désagréable qui incite, pour profiter à plein de la mécanique, à tout déconnecter. Pour adapter le bloc RC8-R aux exigences de la conduite d’un trail, les trois premiers rapports tirent beaucoup plus court pour permettre l’évolution sur un filet de gaz, et le haut moteur a été complètement revu pour plus de douceur de fonctionnement à bas régime.

Enfin, on regrettait la sélection bruyante des premières RC8. Un vieux souvenir, désormais : la boîte est rapide et silencieuse. Notons que la conso, qui a pu être surveillée grâce à l’ordinateur de bord, s’élève à 5,7 l/100 à 130 km/h, mais qu’elle grimpe à 8 l en usage plus soutenu.

Côté châssis

La 1190 invite à une conduite plus raisonnée. Les propriétaires de 990 SMT doivent être prévenus, l’Adventure est beaucoup moins joueuse. Ici, plus question de faire un petit lever de roue en sortie de courbe, l’Adventure est collée à la route sur toutes les phases de la conduite. Attention, sérieuse ne veut pas dire ennuyeuse car son train avant s’avère rapide et précis et la machine bénéficie de série de pneumatiques performants (Conti Trail Attack 2).

Question rythme, elle soutient la comparaison avec une Ducati 1200 Mulstistrada. Les suspensions préprogrammables électriquement EDS (pour Electric Damping System) de notre modèle, disponibles en option pour 1.000 euros, nous sont apparues efficaces, bien que les réglages en mode « Solo » restent souples, même sur la position « Sport ». Il faudra enclencher le mode « Duo » pour profiter d’une machine vraiment ferme, ce qui sacrifie au passage le confort. S’agissant du freinage, le couplage électrique (à la pédale) fonctionne parfaitement, mais l’on aurait aimé plus de mordant à la prise du levier.

Verdict. Cette KTM 1190 Adventure s’inscrit dans la lignée des trails sportifs, comme l’a fait avant elle la Ducati 1200 Multistrada. Reste à savoir si son caractère généreux passé les mi-régimes survivra au bridage français. Avec son ergonomie ajustable en tous sens, le conducteur se sent immédiatement à son aise et les performances de la partie-cycle (une fois réglée dure) permettent de rouler bon train sans avoir à forcer sur le guidon. Nous avons en revanche moins aimé la main mise de l’électronique lors de certaines phases de roulage. Un système trop intrusif à notre goût sur les modes « Street » et « Sport ». Reste un atout de taille : son tarif mesuré de 13.990 €, soit 2.000 de moins que celui de ses principales concurrentes.

Photos Francesco Montero et Sebas Romero

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