L’usager en infraction, propriétaire de son véhicule, perdrait définitivement son moyen de transport au profit de l’État. « Au-delà de la perte économique que représente une telle sanction, la confiscation est une atteinte grave au droit de propriété qui doit rester exceptionnelle et découler du seul pouvoir souverain d’appréciation des juges, comme cela existe déjà », commente la Commission juridique de la Fédération française des motards en colère (CJ FFMC). Or, Loppsi version 2 propose de rendre automatique la confiscation.

Les juges pourront décider de ne pas appliquer cette peine, mais devront alors motiver leur décision. « On réduit ainsi considérablement le principe constitutionnel de personnalisation des peines, selon lequel "la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur" (article 132-24 du code pénal). Confisquer automatiquement les véhicules ne rendra pas les routes plus sûres, mais le système répressif plus arbitraire et de plus en plus mal accepté », poursuit la CJ FFMC.

Les Motards en colère estiment que plus de 20.000 véhicules pourraient être ainsi confisqués, avec un coût pour l’État estimé à plus de 8 millions d’euros, gaspillés en frais de garde rien que pour les conduites sans permis.

Politique sécuritaire
Pire encore, cette loi qui n’est autre qu’un outil de communication destiné à renforcer l’impression de politique sécuritaire, sera totalement inefficace : « C’est facilement contournable ; pour échapper à la sanction, les usagers de la route n’auront qu’à rouler avec un véhicule qui ne leur appartient pas », traduit la FFMC.

Ethylotest anti-démarrage
Autre volet « sécurité routière » de Loppsi, l’obligation de conduire pendant une durée maximale de cinq ans un véhicule équipé d’un dispositif d’anti-démarrage par éthylotest électronique. « Cela apparaît tout aussi fantaisiste, estime la FFMC. Au-delà des légitimes questions sur la fiabilité de ces appareils de mesure à moyen terme, on est en droit de s’interroger sur la mise en application d’une telle sanction et surtout des garanties qui l’accompagneront pour s’assurer que c’est bien le conducteur qui satisfera au contrôle avant le démarrage du véhicule. » Là encore, la « communication législative » semble avoir pris le pas sur la raison.

Soupçons et mauvaises intentions
Mais le pire est peut-être le soupçon de faute commise… Le projet Loppsi autorise en effet la rétention et la suspension administrative du permis de conduire des conducteurs qui, à la suite d’un accident de la circulation ayant entraîné la mort d’une personne, seraient simplement soupçonnés d’avoir commis une infraction en matière de respect des vitesses, de croisement, de dépassement, d’intersection et de priorités de passages.

En plein débat sur l’utilisation disproportionnée de la garde à vue, ce type d’« infraction » ferait presque sourire… « De nombreux usagers risquent d’être condamnés avant même d’avoir été jugés, commente la CJ FFMC. Une fois encore, en automatisant et en radicalisant les sanctions, ce nouveau projet de loi mise uniquement sur la répression pour réduire l’insécurité routière, se bornant à une lecture manichéenne des chiffres, sans même évoquer le volet humain de ces comportements délictuels. Seule une meilleure formation des conducteurs permettra de réduire durablement le nombre d’accidents. » Il y a maintenant à espérer que nos élus, les députés, ramènent les ministres à la raison.

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