Les 24h du Mans, ce n’est pas seulement une course, mais aussi une formidable concentration moto, avec près de 90 000 aficionados des deux roues déferlant sur un circuit implanté en pleine communauté urbaine. La cohabitation entre l’événement et la ville qui l’accueille semble s’être améliorée cette année.

Juste après l’édition 2004 des 24h, autorités et médias locaux s’étaient montrés scandalisés par le spectacle de désolation dans les aires de camping autour du circuit. En cause, un public pas seulement composé de motards, mais aussi de fêtards de tout poil qui seraient uniquement venu là pour profiter du foutoir ambiant. Résultat, trois semaines pour nettoyer les terrains et mettre aux ordures non ménagères carcasses de voitures ou de caravanes découpées à la disqueuse dans des moments d’égarement.

Une seule carcasse de voiture à déplorer, et encore cette Renault 5 "est venue par la route et on viendra la rechercher lundi avec une fourgonnette", jure ce groupe de spectateurs sarthois.

Contrôles drastiques. Cette année, afin d’éviter de nouveaux débordements qui pouvaient aboutir au naufrage de l’épreuve, l’Automobile Club de l’Ouest (ACO), organisateur de l’événement, avait pris les devants : c’en était fini des campings gratuits dans les champs, voire sur les ronds-points alentours. Un service d’ordre musclé, constitué d’un millier d’hommes, contrôlait les accès aux campings parfaitement délimités jouxtant le circuit, baptisés Rouge, Bleu, Vert, Concentration, Houx et Beauséjour.

Un plan de circulation drastique, concocté avec la préfecture et incluant le contrôle routier des CRS, n’autorisait que des motos et des voitures particulières dans les aires aménagées les plus proches, avec, grande nouveauté, l’obligation pour chaque campeur de disposer d’un billet d’accès au circuit.

Les camionnettes, caravanes et camping-cars étaient invités à stationner sur l’aire de Beauséjour, éloignée du circuit de quelques kilomètres et payante (15 € par véhicule). Tous les objets illicites étaient confisqués jusqu’au retour. Scies à bois, haches, tronçonneuses et surtout moteurs montés sur châssis, destinés à faire du bruit jusqu’au bout de la nuit, se voyaient donc interdits de campement.

Certains ont improvisé une piste de stunt dans une ligne droite à côté du camping du Houx, malgré les chicanes posées par l’Equipement. Les conditions de sécurité étaient limites pour faire de l’acrobatie à grande vitesse au milieu du public, mais il n’y a heureusement pas eu de casse.

Des longueurs aux entrées. Contrôler un par un les 90 000 spectateurs, arrivant en masse dans la journée du vendredi, fut long et fastidieux. Aux entrées du circuit, la vérification des couteaux dans les sacs des piétons prenait des heures ; un embouteillage monstre bloqua le carrefour Antarès le vendredi soir jusqu’à 3 heures du matin ; certains groupes furent contraints de se scinder en deux, les uns étant en moto et les autres suivant en camionnette avec la logistique à l’intérieur.

L’ambiance fut, de l’avis d’une grande partie du public, un apaisement dans les campings, même si les rupteurs des motos claquèrent jusqu’à plus d’heure.

Campings apaisés. Mais, le résultat fut, de l’avis d’une grande partie du public, un apaisement dans les campings, même si les rupteurs des motos claquèrent jusqu’à plus d’heure. Et le niveau d’ébriété ambiant assez élevé, ce qui est incontournable dans tout rassemblement festif, qu’il soit mécanique ou non.

Il fallait se rendre au fin fond du camping Beauséjour, chez les recalés des autres campings, pour trouver des opposants à la nouvelle formule, ainsi que quelques groupes suffisamment malins pour avoir réussi à faire passer au travers des mailles des contrôles quelques bécanes sur lesquelles fleurissaient de drôles d’échappements, destinés à faire le plus de bruit possible et de jolies flammes une fois gavés d’huile et d’essence.

D’autres ingénieux venus du Nord installèrent leur "machine à burner", constituée d’une plaque de tôle cylindrique sur laquelle une pauvre vieille bécane, dont la roue avant est remplacée par un axe, se prend pour un tourniquet sous la force impulsée par le pneu dérapant sur la tôle. Du spectacle mécanique qui enthousiasmait les motards de Beauséjour, un peu contraints par l’éloignement, ou volontairement pour certains, à rester la plupart du week-end dans le camping sans voir une minute de la course.

Quant aux ravers qui s’étaient soit-disant greffés au rassemblement pour cause de gratuité de campement ces dernières années, ils n’étaient pas au rendez-vous.

Certaines provocations peuvent être diversement appréciées, mais il n’y a pas eu de débordements chez les motards.

Autosatisfaction générale. La préfecture de la Sarthe se félicitait dès le samedi matin d’un état d’esprit plus responsable du public motard. Le lundi, Ouest France s’accordait à dire que "les 24h, c’est pas les Journées Mondiales de la Jeunesse" (dieu merci ? A chacun d’apprécier) mais que dans l’ensemble le week-end s’était bien passé puisqu’on ne déplorait aucun débordement, et un seul accident de moto sur les routes alentours, ayant tout de même grièvement blessé un jeune de 29 ans.

On peut déplorer, comme la partie extrémiste du public, que l’une des plus grandes concentres de France ne s’aseptise à force de contrôles de plus en plus drastiques. Mais le plus grand nombre s’est montré satisfait de l’apaisement. Et puis, il en allait de la survie des 24h : une édition mal maîtrisée de plus, des riverains mécontents et la préfecture, les mairies riveraines aidées de la presse locale n’auraient pas hésité à faire pression sur l’organisateur pour fermer définitivement les portes aux motards...

Nicolas Grumel

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