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Expert en accidentologie des motards Un travail de précision Rapport pour avocat

Selon le PV dressé par la gendarmerie, l’automobiliste a déclaré « Une seconde avant il n’y avait rien, la seconde d’après la moto m’a percuté ! ».

Motard = coupable

Il a repris l’enquête, les déclarations des deux parties et a calculé la vitesse de la moto. « Selon les déclarations de l’automobiliste, la moto devait rouler à plus de 200 km/h dans une courbe. Ce qui est, selon la topographie du terrain, impossible à cause du virage » détaille Gilles. Cette affaire n’aurait jamais pu être gagnée, si l’avocat du motard ne lui avait pas fait confiance.

Car désormais les avocats font appel à lui, pour les aider à traiter les dossiers d’accidentologie.

Il se rappelle ses débuts, il y a deux ans, quand il rencontre Anne Lombard, avocate avec qui il sympathise. « Elle m’a présenté plusieurs dossiers d’accidents de moto qu’elle devait défendre en appel. Loin d’être neutres, les procès-verbaux sous-entendaient trop souvent une vitesse obligatoirement excessive de la moto, simplement parce qu’elle pouvait atteindre cette vitesse ! Les jugements étaient totalement inéquitables » assure t-il.

Du coup « J’ai rédigé un argumentaire pour chaque dossier et grâce au talent de Maître Lombard, tous ces procès ont été gagnés en appel. Il suffit de donner aux magistrats des éléments clairs, compréhensibles et justes, alors les jugements ont de très fortes chances d’être équitables... »

Cela est d’autant plus facile pour Gilles qui a été Inspecteur Départemental pour la Sécurité Routière (IDSR) auprès du programme REAGIR (Réagir par des Enquêtes sur les Accidents Graves et par des Initiatives pour y Remédier.)

Lancé en 1983, ce programme a été abandonné en 2004 par l’actuel Ministre des Transports « La suppression des IDSR par de Robien est un coup de poignard porté à la connaissance des accidents... » commente t-il. « ...Mêmes si les enquêtes n’étaient pas parfaites, elles étaient toujours plus détaillées que les PV de police ou de gendarmerie... ».

Des experts valables qu’en auto....

A la décharge de l’appareil judiciaire et ses rouages, Gilles explique que les outils pour comprendre les accidents de moto n’existent tout simplement pas « Les experts qui rendent leur verdict auprès des Tribunaux, appliquent des formules destinées à l’auto. Résultat on impute au motard des vitesses qui dépassent l’entendement ! » explique-t-il.

Dans le pire des cas, Gilles doit aussi faire face à certains experts motophobes ou ignorants tout de la moto « Dans un cas l’expert nommé, a appliqué un coefficient d’accélération d’une ER5 (500 cm3) digne d’une 1000 GSXR ! »

Enfin, les formules de déformation des voitures à cause d’un impact, ne marchent tout simplement pas avec les motos. « Il n’existe pas de crash test pour les motos ». Et puis « Chaque machine réagit de manière différente : j’ai eu le cas de trois motos qui ont percuté un obstacle. Sur la première la fourche a cassé net, la deuxième qui était une BM, la fourche n’a quasiment pas bougé, mais la moto a pivoté sur son axe et s’est encastrée dans la voiture. Enfin la troisième a vu la fourche se plier sous le moteur ».

Pour mieux comprendre toutes ces données, Gilles a créé une base d’informations intitulée ACMé ( Accidentologie Moto Étude) Son objet est de collecter et de diffuser toutes informations concernant la moto, et particulièrement sur tout ce qui est lié de près ou de loin à l’accident. Face aux caricatures dressées par le gouvernement et certains médias, ACMé est là pour apporter un éclairage honnête sur le motard et sa monture.

Dans le monde du deux-roue, elle peut apporter une aide en informations aux victimes, informer sur les causes et les conséquences de l’accident, mais aussi éclairer le plus grand nombre d’entre nous, parents, éducateurs, magistrats, médecins, journalistes, etc... « Plus généralement l’idée est de créer une base de données accessibles librement à tout ceux qui en ont besoin. Depuis juin, nous avons crée un site Internet qui va se remplir petit à petit » confirme le consultant.

Actuellement, il a signé la grande majorité des articles qui figurent sur le site, mais « j’amorce ainsi la pompe » indique l’expert « car au fur et à mesure qu’Acmé se fait connaître, des motards qui ont des connaissances à partager, se proposent pour en écrire de nouveaux . »
« La recherche d’informations est une occupation très longue. Les données intéressantes sont souvent enfouies dans des documents longs et d’accès difficile. Le site de l’ ONISR (Observatoire National Interministériel de Sécurité Routière) n’est souvent qu’une vitrine et une caution scientifique pour la propagande gouvernementale. Quant à l’INRETS (Institut National de Recherche sur les Transports et leur Sécurité), il est certainement composé de scientifiques brillants, ses recherches sont sans doute intéressantes, mais la plupart ne sont pas publiées. De plus, le fait qu’un scientifique de l’INRETS accompagne le ministre de Robien dans ses efforts de propagande et qu’un autre (Jean Pascal Desailly, psychologue) fasse la promotion de la Ligue Contre La Violence Routière, ne plaide pas en faveur de leur impartialité... »

Premier expert moto de France

Il a depuis deux ans laissé tombé son travail de responsable commercial, pour se lancer à fond dans la défense du motard. Il avoue ainsi passer près de 200H de travail pour un seul dossier qui lui sera payé 580 € !

« Mais je pense qu’à l’avenir je demanderai un pourcentage sur les sommes perçues par les victimes, même si l’argent n’est pas du tout mon moteur principal » declare-t-il. Cet acharné de travail épluche les procès verbaux, tel Peter Falk dans Columbo, il se rend sur les lieux des accidents, prend des mesures, des photos, recueille les témoignages, bref, tous les éléments disponibles.

Vient ensuite l’étude des conducteurs, de leurs véhicules et de l’infrastructure. Séquence par séquence, il reconstitue l’accident en s’aidant lorsque cela est possible des lois de la physique.
Enfin, il rédige un dossier en s’attachant à ce qu’il soit le plus clair possible. L’avocat va utiliser ce dossier pour la défense de son client et il sera remis au magistrat. « Une chose très importante est que, même si je suis payé par un motard ou sa famille, l’expertise est destinée finalement à un magistrat. Aussi cette expertise se doit de tendre vers l’impartialité et l’honnêteté maximales » conclut-il.

Souhaitons lui longue route.

Alain LE POUPON - Correspondant 44

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