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Contrôle technique : lobbying et manifestations Contrôle technique : le point avec la FEMA

Le CT moto n’est pas vraiment supprimé, il est repoussé à 2022. En quoi est-ce une victoire ? Une suppression pure et simple était-elle inenvisageable ?

F. Jeorge : Par rapport au texte initial, qui prévoyait un CT annuel pour tout véhicule terrestre à moteur dès demain, sans aucune possibilité de dérogation, oui, c’est une vraie victoire. Et ce n’était pas joué d’avance.

En matière de loi, les textes sont rarement complètement supprimés. Au mieux, les dispositions sont mises de côté, sur une étagère.

Tout est affaire de compromis, surtout au niveau européen : on satisfait ceux qui poussent pour un CT en le gardant techniquement à portée de main, mais dans des conditions qui donnent clairement raison aux associations d’usagers. On n’en reparle que dans (presque) dix ans, et de façon suffisamment souple pour que rien ne soit perdu pour les usagers…

Il reste la problématique des motos et scooters de petite cylindrée (les 50 cm3). Qu’en est-il pour cette catégorie ?

F. Jeorge : C’est un autre compromis qui concerne les 50 cm3. Ils ont été extraits du cadre général depuis un moment. Plusieurs pays sont clairement opposés à les contrôler, à commencer par l’Allemagne qui pourtant contrôle les gros cubes ! En l’état actuel des choses, ils ne sont plus concernés par le projet européen.

Le report du CT moto à 2022 signifie-t-il clairement qu’il n’a aucune influence sur la sécurité routière ?

F. Jeorge : Les situations varient trop d’un pays à l’autre pour qu’on puisse gérer ce sujet uniformément. Certains pays ont un CT depuis longtemps et les associations de motards locales s’en satisfont.

D’autres le refusent bec et ongles avec de solides arguments. D’ailleurs, la FEMA a présenté une compilation d’études scientifiques pointant l’impact extrêmement limité du CT sur l’accidentalité deux-roues.

L’important, ce qu’on demandait et qu’on a obtenu, est que chaque État membre reste libre de choisir selon son parc et ses besoins. On ne peut pas imposer la même chose de la Grèce à l’Islande, de la France à la Lituanie, surtout quand l’intérêt absolu n’est pas démontré.

L’Europe ou même la France, au motif de la protection de l’environnement notamment, reviendront à la charge un jour ou l’autre, non ? Faut-il se préparer à se battre régulièrement contre le CT moto ?

F. Jeorge : Ils ont déjà souvent essayé, rien qu’en France, regardez les archives de Motomag sur les décennies passées ! Le CT a tenté plusieurs fois de se faire une place, pour les cyclos encore récemment.

À chaque fois, les tentatives ont été déjouées par la FFMC. Là c’était l’échelle au-dessus, celui de l’Europe. Nous avons obtenu le même résultat grâce au même acharnement militant.

La question environnementale sera en effet un défi, mais les motards en sont conscients, et anticipent. Ainsi, la FEMA a demandé, et obtenu, des engagements sur la durabilité des équipements anti-pollution ; les deux-roues ont fait des progrès extrêmement rapides ces dernières années (voir la progression des normes Euro), les moteurs 2T ont presque disparu et plusieurs études prouvent la contribution positive des 2RM, qui réduisent la pollution en fluidifiant le trafic.

La question est complexe, et si le CT n’est pas une réponse adaptée à ce sujet-là non plus, il faudra de nouveau se battre pour le repousser. Nous serons là pour ça.

Combien de temps les motards peuvent conserver cette spécificité ?

F. Jeorge : Avec le compromis trouvé, indéfiniment ! D’ici à 2022, chaque État membre pourra montrer que son accidentalité baisse par d’autres moyens que le CT…

Or, proportionnellement à la progression du parc, la baisse est générale depuis plusieurs décennies. Et quand bien même l’option CT serait retenue, la fréquence et le type de contrôle resteraient à déterminer.

C’est une grosse avancée par rapport au projet initial de règlement, car les associations de chaque pays pourront encore peser sur les décisions nationales. Enfin, le texte prévoit un renforcement des contrôles aléatoires sur la route, pour lesquels tout est déjà en place et qui ne sont pas absurdes. Chacun a, en effet, la responsabilité de maintenir son véhicule en bon état, afin qu’il s’en échappe un niveau de pollution minimal.

La bataille a été longue et rude, quels sont les ingrédients pour se faire entendre des instances européennes ? Lobbying dans les couloirs des institutions ou manifestations, ou les deux ?

F. Jeorge : Cela dépend du niveau auquel se jouent les discussions. Le dialogue est toujours un pré-requis. Mais s’il échoue, plus on s’adresse à des élus locaux, plus ils sont susceptibles d’être sensibles aux manifs.

À l’inverse, à mesure que l’on grimpe dans les méandres de l’Europe, le nombre de personnes concernées se réduit et s’éclate géographiquement. La seule possibilité est le travail de fourmi des militants pour aller convaincre individuellement chaque élu, chaque fonctionnaire…

Là, c’est la valse des réunions, rendez-vous, contacts… Un travail ingrat, mal compris, parfois confondu avec de la compromission, mais qui finit par porter ses fruits, la preuve.

J’en profite pour lever bien haut mon casque à tous ceux qui se sont démenés pour porter la voix des motards, tant parmi les bénévoles que les salariés des associations.

On dit que la FEMA est dans une position délicate actuellement, financièrement s’entend. Que faut-il faire pour la soutenir ?

F. Jeorge : En effet, la FEMA souffre de la crise qui affecte le monde moto en Europe. Elle ne vit que des cotisations de ses associations membres, proportionnelles à leur nombre d’adhérents ; or, beaucoup d’associations sont en baisse, voire disparaissent.

Le budget de la fédération européenne a donc pris une sérieuse claque et son équipe salariée s’est réduite… alors qu’on n’a jamais eu autant besoin d’elle ! L’histoire ne s’arrête pas au CT, la FEMA a de nombreux dossiers très techniques et politiques sur le feu, difficiles à mettre en avant car ils ne toucheront les motards que dans plusieurs années, mais c’est maintenant qu’il faut les traiter.

Pour aider la FEMA, il est possible de faire un don ou de la soutenir via son entreprise ou son club (sur le site de la FEMA).

Mais la première des actions est de soutenir les associations qui en sont membres, dont la FFMC pour la France. Chaque adhésion locale contribue au budget européen, et plus les associations nationales sont fortes, mieux elles peuvent relayer et appuyer le travail européen.

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