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Garde-à-vue abusive à Montpellier : divergences Garde-à-vue abusive à Montpellier : pour la sécurité

Pas une première
Comme l’épisode n’est pas le premier du genre, Jean-Michel, comme à l’habitude, descend demander aux policiers de sortir de sa propriété pour faire leur contrôle. Deux membres du conseil le suivent et les autres s’installent au balcon de la salle pour suivre les événements.

– Jean-Michel : « Je ne cautionne pas votre contrôle. Merci de ne pas rester sur ma propriété. »
– Un policier : « Si t’es pas content, t’as qu’à porter plainte ! »
– Jean-Michel : « Vous n’êtes pas dans votre droit, retournez sur la voie publique. »
– Le policier : « Si t’insistes, on t’embarque pour ivresse sur la voie publique. »

Même si Jean-Michel reste calme, le ton monte rapidement. Les policiers sont nerveux, agressifs.

En moins de 5 minutes, l’un des policiers s’adresse déjà à la cantonade pour nous traiter d’« abrutis ». Il y a peu d’échanges, les motards choisissant de rester calmes, voire silencieux. Du côté des policiers, les invectivent continuent. Visiblement convaincus d’être investis d’une mission pour laquelle tout est permis, ils se font moralisateurs : « C’est à cause de gens comme vous qu’il y aura des morts. »

Emma demande qui aurait un appareil photo pour fixer la scène. Plusieurs photos sont prises. Quelques policiers sortent leurs lampes torches et s’amusent visiblement, en les agitant pour gêner les prises de vue.

Pendant, ce temps, Pierro est parti à pied, le long de la route. Pierre et Victor le suivent peu de temps après. Ils se placent au feu tricolore et font signe aux conducteurs de rouler doucement.

Les véhicules sont finalement déplacés et légèrement éloignés de l’entrée de la station-service. L’un des policiers, aux jumelles, signale à ses collègues la position des trois piétons.

Au bout d’un moment, le groupe de policiers lève le camp. On entend : « Choppez-les ! On les embarque. »

Arrestation, menottes, intimidations…
Il est 22 h 35, deux véhicules foncent vers Pierro, Victor et Pierre et les encerclent. Les policiers en sortent, tonfa à la main : « Tournez-vous, face au mur, levez les mains. » Palpation et menottes.
« On vous embarque, vous passerez devant le juge pour outrage à agent. Vous aurez un casier et vous ne pourrez plus postuler pour certains emplois. »

Dans le véhicule, qui a pris la direction de l’hôtel de police, les trois motards répondent aux questions sur leur identité et sur leur consommation d’alcool : Pierre n’a rien bu, Pierro et Victor ont bu une bière, environ une heure auparavant.
Une discussion s’engage alors entre les policiers, les échanges tournent autour de « l’alcool » et « l’ivresse ».

Le véhicule fait demi-tour et prend la direction de l’hôpital. C’est Starsky et Hutch ! Sûrement pour répondre à une urgence vitale, le fourgon et son escorte traversent la ville à fond de train, gyrophare allumé, grillant tous les feux et priorités. À l’intérieur, les trois hommes, toujours menottés et sans ceintures de sécurité, comprennent enfin l’origine du mot « panier à salade ».

Pendant le trajet, plusieurs policiers se sentent obligés de leur faire la morale : « Vous nous empêchez de faire notre travail, nous œuvrons pour la sécurité. Peut-être qu’à cause de vous il y a un accident en ce moment. »

La prise de sang, une urgence
Sur place, aux Urgences, 5 ou 6 personnes attendent d’être soignées, certaines dans des fauteuils roulants ou sur des brancards. Les policiers sont visiblement connus du médecin qui les prend en charge : « T’as rien d’autre à m’amener que des gens qui n’ont visiblement rien bu ? »

Pierro demande au médecin de lui expliquer à quoi sert la prise de sang qu’il vient de lui faire (piqûre au bout du doigt). « On va mesurer le taux de sucre dans votre sang et s’assurer de votre état général pour la garde-à-vue. » Il lui prend sa tension.

Pendant que se déroulent les prises de sang, les deux policiers les plus agressifs et énervés (visiblement les plus gradés) interpellent constamment ceux qu’ils viennent d’arrêter et cherchent à engager la conversation. Ils crient, les tutoient, ne les insultent pas. Les autres policiers restent en spectateurs.

La leçon de morale continue : « C’est grâce à nos radars qu’on sauve des vies. » (…) « Vous ne vous rendez pas compte, avec ce que vous avez fait, il aurait pu y avoir un mort. J’aimerais bien voir votre tête quand vous serez face à la veuve. »

« On a plus mis un PV »
Les trois motards restent le plus souvent silencieux, mais parfois la tentation est trop forte…
« Depuis que vous avez commencé à faire signe aux voitures de ralentir, on n’a plus mis un PV ! »
« Ah, parce que ce qui vous intéresse, c’est uniquement de mettre des PV ? »
« Pas du tout ! »

Un policier interpelle Pierre :
« De toute façon, on se reverra. Il n’y a que les montagnes qui ne se rencontrent pas. Quand on se reverra, t’as intérêt à avoir un carnet de chèque bien rempli. »
« Vous me menacez ? Devant des témoins ? »
« Non, ce ne sont pas des menaces... »
« Si. Ce sont des menaces. »
– Silence…

Hôtel de police : fouille au corps
À l’arrivée à l’hôtel de police, retrait des menottes. Les policiers qui se sont chargés de l’arrestation s’en vont. Les gardés à vue ont encore leurs téléphones mobiles sur eux. Pierre veut appeler la FFMC, mais il en est empêché :
« Eh ! Vous vous croyez où ? Raccrochez ! »
« Je peux quand même donner des nouvelles. Ils risquent de s’inquiéter. »
« Non, pas besoin. Ici, vous ne risquez rien. »
Les portables sont confisqués.

Pierre, Victor et Pierro doivent se déshabiller pour une fouille au corps : chacun passe, à son tour, dans un bureau auprès d’un gardien qui assure la fouille.
En slip, Victor ne bouge pas :
« Je crois qu’on n’ira pas plus loin ? »
– Le gardien, gentiment : « Si. Je vous explique : vous vous mettez face au mur et vous baissez votre slip jusqu’aux genoux. »
Victor s’exécute.
« C’est bon. Vous pouvez vous rhabiller. »

On leur retire leurs ceintures, clés, etc. Le gardien parle à Victor « d’ivresse publique manifeste ». Surpris, Victor demande son taux d’alcoolémie. Gentiment, le gardien répond : « On ne va pas vous faire souffler dans le ballon pour ça. » Sur la porte de la cellule, il inscrit l’identité de Victor et « IPM ».

Avant d’entrer en cellule, Victor demande :
« Dites, est-ce que je peux avoir un verre d’eau ? »
« Vous avez vraiment soif, vous ! »
« Ben, oui. Mais, bon, si c’est pas possible, tant pis. »
Le gardien l’accompagne jusqu’au lavabo, puis le place en cellule.

Les lieux sont corrects, visiblement récents, les banquettes propres. Pierro pense avoir eu la « cellule VIP » ! On les place en cellule. Ils doivent laisser leurs chaussures devant la porte avant d’entrer.
Pierro est seul, il arrive à s’endormir, niché dans sa doudoune. Pierre est placé avec une autre personne. Victor, d’abord seul dans un espace sans matelas ni couverture, est ensuite déplacé dans une autre cellule, déjà occupée par quatre hommes.

Pendant le transfert, il passe devant une cellule où un homme tape violemment sur la porte, depuis déjà un certain temps :
« J’ai soif ! »
Le gardien ouvre la cellule : « Qu‘est-ce que tu veux ? »
– Silence…
Le gardien referme la porte et s’éloigne.
« Gardien ! Je veux un verre d’eau. »
« Ta g*** ! Tu pêtes les c*** ! Tu l’as pas ton verre d’eau. »

Au bout d’un certain temps, les gardiens font sortir les membres de la FFMC de cellule. Ils peuvent remettre leurs chaussures.
L’un des gardiens demande gentiment :
« Alors, vous allez mieux ? »
– Pierro : « Je n’étais pas bourré : je n’avais bu qu’une bière. On est ici parce qu’on a eu un accrochage avec vos collègues. »
Visiblement, le gardien ne connaissait pas le motif réel de la garde-à-vue…

PV pré-rempli… bientôt pré-signé ?!!
Chacun récupère ses effets personnels. On leur présente un procès-verbal d’ivresse manifeste sur la voie publique, pré-rempli, d’une page de texte dactylographié, devenu gris après avoir été visiblement photocopié souvent. Le policier y ajoute manuellement les déclarations de chacun, en les lisant à haute voix :
– Pierre : « Je reconnais ne pas avoir bu. »
– Le policier : « Je ne me souviens pas de ce que j’ai bu. »
– Pierre : « Non, je n’avais rien bu ! »
Le policier en prend note.

Victor et Pierro reconnaissent avoir bu une bière.
– Le policier : « Quelle marque ? »
– Pierro : « Une Kronenbourg. »
– Le policier : « Signez ! »
Le policier tend un document à Pierro. Celui-ci n’est visiblement pas assez rapide puisque, à plusieurs reprises, le policier le presse de signer « et vite ! »

Chacun des 2 policiers présents tend un exemplaire à Victor. Comme il ne peut pas signer les deux en même temps, les policiers s’agitent et insistent vigoureusement pour qu’il « signe vite ! »

C’est au tour de Pierre qui, sérieux, tient à lire attentivement ce qu’il doit signer :
« Signe ! »
– …
« Signe. Si tu veux partir, tu signes. »
– …
« Bon, tu signes ! Tant que tu lis, tu sors pas. »

Il est 3 heures du matin, chacun signe son PV. C’est leur première garde-à-vue, ils n’ont pas vraiment prêté attention au texte pré-rempli.

Pendant la garde-à-vue, à aucun moment les trois hommes n’ont été informés de leurs droits (famille, médecin, avocat), ni interrogés. À plusieurs reprises, ils ont demandé quelle heure il était et n’ont jamais pu avoir de réponse. Victor a demandé à connaître les résultats de sa prise de sang : il n’a pas obtenu de réponse…

Ils ont finalement été raccompagnés à la sortie de l’hôtel de police.

La FFMC 34

Enquête à suivre dans Moto Magazine de Mai 2010

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