Comparatifs

La 1000 GT n’est pas mal non plus. D’autant que le modèle qui va nous accompagner sur ce comparatif est un peu spécial : Ducati ayant été incapable de nous fournir une machine, c’est un abonné de Moto Mag, Philippe, contacté par mail, qui s’est spontanément proposé de nous accompagner. Amateur de sport à l’ancienne, il a puisé dans le catalogue « Ducati Performance » pour équiper sa belle : guidon bracelets, pignon de sortie de boîte de 14 dents, boîtier électronique et échappement Termignoni inox (à chicanes démontables…). Parée pour en découdre, la belle Ducat’ en jette !

Et la Voxan alors ? Du calme, on a gardé le meilleur (et le pire) pour la fin. Dans sa livrée bleue électrique (pas franchement rétro, comme teinte), la Voxan interpelle par son homogénéité discutable. Entre le superbe réservoir alu (issu de la Black Magic) aux soudures TIG impeccables et la coque arrière en vulgaire polyester brut même pas verni, on navigue entre deux mondes. Toute la moto donne d’ailleurs l’impression d’avoir été assemblée sans grande réflexion. Derrière les tentaculaires platines repose-pieds pilote-passager, taillés dans la masse et réglables (une beauté), se cache une implantation électrique, au niveau de la batterie, digne d’un bas de gamme chinois ! Pour ce premier contact visuel, la moue dubitative est de mise…

Prise en main : Triumph la citadine.

À l’assaut des ruelles tortueuses et dénivelées du vieux Marseille – la rubrique essai fuyait alors le froid et la grisaille nordique –, la Triumph se montre bien adaptée. Position de conduite naturelle, moteur souple secondé par une transmission super-douce et par un très bon rayon de braquage (4,50 m), l’anglaise se joue des pièges phocéens avec l’aisance d’un scooter 125 ! Incroyable de facilité, elle disparaît rapidement, laissant les deux autres empêtrées dans une circulation un tantinet anarchique.

Le duo Voxan-Ducati est en effet à la peine. La française se distingue par une position de conduite franchement bizarre : la distance selle-repose-pieds est si courte que les jambes sont plus repliées que sur une hypersport, alors que le haut du corps bénéficie du confort d’un guidon de roadster. De plus, son diamètre de braquage est digne de celui des cargos mouillants dans la rade marseillaise (6,90 m) et la souplesse de l’ensemble moteur-embrayage-transmission est aux abonnés absents… C’est clair, la Voxan n’aime pas la ville. Même la Ducati, ici équipée de guidons bracelets, s’en sort mieux. L’injection de l’italienne est parfaitement maîtrisée et le bénéfice d’un pignon de 14 dents se sent immédiatement. Le moteur hoquette moins sur un filet de gaz et le recours à l’embrayage, au détour d’une rue par exemple, n’est plus indispensable. Reste qu’il faut toujours 6,20 m pour faire demi-tour. Vite, de l’air !

Comportement : Voxan ouvre la route.
Direction Cassis et ses superbes calanques via la D559. Le trafic est léger, et permet un rythme touristico-sportif qui met en valeur les nombreuses qualités de la « classique noire ». Malgré une conception qui date de 15 ans, le châssis de la Voxan est toujours une référence ! Vif, précis et stable, il autorise une conduite sportive sans retenue. Le bon travail des suspensions, allié à un très bon équilibre des masses et à un train avant sain en toutes circonstances, permet une certaine audace à l’approche des sinuosités de la route. Audace qui serait malvenue sur la Ducati, et interdite sur la Triumph. L’italienne pèche en effet par un train avant manquant de rigueur et par des suspensions arrière trop précontraintes (ressorts trop durs). Cela dit, la 1000 GT est capable d’enrouler à bonne allure mais ne pourra jamais suivre un pilote « énervé » au guidon d’une Black Classic ! Quant à l’apport d’une paire de guidons bracelets sur cette Ducat’, le bilan est mitigé. La position s’est radicalisée, et le bras de levier ayant diminué, il faut encore plus la forcer au contre-braquage pour la faire « tourner ». Le train avant, un brin pataud d’origine, n’avait pas besoin de ça…

Fermant la marche, l’anglaise ne boxe pas dans la même catégorie. Plus lourde, plus longue et équipée de suspensions simples, la « Bonnie » s’accommode d’une conduite coulée, en accord avec son inertie et sa philosophie. Mais une fois le mode d’emploi assimilé, elle vous gratifie d’une précision et d’une stabilité en courbe plutôt rassurante, ce qui ne plaira pas aux repose-pieds, souvent en contact avec le sol. Clôturons ce chapitre par le freinage, tout juste correct pour la Triumph, malgré de nouvelles garnitures avant. Sur la Ducati et la Voxan c’est bien mieux, mais le système demande de la poigne et malgré ses étriers à doubles pistons à l’avant, la française ne se démarque pas franchement.

Moteur : Voxan encore en tête.

Pour les amoureux de caractère bien trempé, le bloc Voxan reste une référence. Tout comme le châssis, il n’a pas pris une ride. Rugueux, caractériel et aux vocalises évocatrices, c’est un plaisir de moduler la poignée de droite en fonction du parcours. Plein comme un œuf, il offre près de 8 m.kg dès 3 000 tours et crache ses 108 ch sous la barre des 9 000 ! Mais bien plus qu’un froid constat comptable, son caractère (et la douceur de sa boîte) est un enchantement permanent dont il est difficile de se lasser.

Difficile, aussi, de ne pas se laisser charmer par le twin italien dopé par la prescription du professeur « Ducati Performance ». La machine de Philippe (voir ci-contre) tirant plus court, libéré au niveau de la voix (quel son !) et mieux alimenté, le « Desmodue » retrouve une seconde jeunesse ! Sorties de courbes et reprises deviennent franchement jouissives… Même la Voxan s’est plusieurs fois retrouvée à la peine en tentant de suivre la Ducat’ lors des relances. Mais au fait, où est la Triumph ? Derrière, loin derrière… Malgré sa coquette cylindrée (près de 900 cm3) et son calage à 360°, le twin parallèle est aussi avare en performances qu’en caractère. Électrique, mollasson et sans le moindre sursaut d’orgueil, il se contente de vous déplacer. Sur ce chapitre, il marque le pas face à la concurrence du jour. Reste le timbre du calage particulier du moteur, sympathique quoique trop étouffé.

Verdict

Black Classic… Qui se souviendra de l’excellence du couple châssis-moteur après avoir pleuré sur la finition et le prix de la française : 16 298 E ? On ne pouvait pas mieux faire pour torpiller une marque déjà en difficulté. Alors Messieurs les responsables, offrez par pitié à vos motos ce qu’elles méritent : une vraie finition et un placement tarifaire décent. Et ainsi rivaliser avec la Ducati, dont le comportement n’est certes pas toujours exemplaire, ou la Triumph, aux sensations un peu décevantes, mais dont les prestations restent globalement à la hauteur des attentes…

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