De Denis Sire, on retient souvent, au-delà du talent pictural et de sa fascination à reproduire les véhicules de compétition, l’univers des pin-up aux mensurations aussi exagérées qu’affriolantes. C’est oublier qu’il se pose à la fois comme le plus onirique et le plus pointu des illustrateurs mécaniques. Attention, show…

Chromos et chronos

Coloriste pointilleux formé aux Arts appliqués – c’est là qu’il a rencontré son pote Franck Margerin, autre motard dessinateur –, Denis Sire n’a cessé de peindre les plus belles heures du sport mécanique du XXe siècle, qu’il soit automobile ou motocycliste.
En 33 ans d’activité professionnelle, temps christique, notre homme, né en 1953 à Saint-Nazaire, a accumulé une somme considérable de travail sous forme d’ouvrages publiés ou de peintures autonomes.
Somme que l’on peut (re)découvrir, au grès des manifestations moto que Denis fréquente régulièrement pour faire connaître son art.
Sa méthode de travail : des tonnes de revues auto et moto glanées dans les puces et les vide-greniers. À partir d’une photo d’archives, Denis s’approprie une scène d’anthologie. Mais, mystère de la (re)création, qu’est-ce qui fait qu’une peinture nous émeut plus que la photo dont elle découle ? Cela s’appelle le style… « Le secret, pour la sensation de vitesse, c’est les fonds filés », explique Denis.

En matière d’histoire du sport mécanique, l’homme connaît ses classiques sur le bout des doigts et peut disserter sur tel fait de course des décennies plus tard. Sous ses pinceaux, c’est toute la magie de centaines de noms et de lieux mythiques qui ressuscite : Brooklands, Daytona, Aermacchi, BSA, Hailwood, Findlay... Une transe graphique où le temps semble suspendu. Et pourtant, jamais l’expression « comme le temps passe vite ! » n’a semblé, à double sens, aussi appropriée.

Mythologie mécanique

Galbe des formes mécaniques et humaines, tourbillon des lignes aérodynamiques pour restituer le défi au chrono et son ivresse, la vitesse par Denis Sire est magnifiée, métamorphosée. Elle émane à la fois de la beauté vénéneuse des machines et du courage des centaures qui les défient, le tout étant consacré par l’érotisme des femmes qui les escortent. Des créatures si outrées que l’humour pointe au-delà du fantasme.
Égéries sulfureuses protégeant du baiser de la mort ou, au contraire, l’insufflant ? Le doute est permis, créant la tension immanente. Car l’art dynamique de Denis n’exclut pas la mélancolie, bien au contraire.
Patronyme royal et prénom quasi-anagramme de « dessin », le sieur Denis Sire a, en dehors de l’art graphique, de qui tenir côté motard : « Dans sa jeunesse, mon père, architecte, est monté jusqu’au cercle polaire en Gnome et Rhône 175 cm3, puis il a possédé une Indian Chief. »

Sorte de pedigree, n’est-il pas ? Dandy, incollable sur le sport mécanique, Denis Sire n’a pas oublié d’être un authentique motard. Jugez-en plutôt par la liste de ses machines : Morini 125, BMW R68, Aermacchi 350 GT Sprint (« J’avais craqué au Bol d’or sur le modèle racing. Un mono horizontal culbuté qui prenait 160. L’arme des privés ! »), mais aussi Harley-Davidson Sportster 1000, Duo Glide et des anglaises – BSA B31, Norton Commando 850 Fastback et Panther Model 100, « le mono anglais ultime ». On a connu moins noble et plus banal : l’homme, comme en peinture, donne dans la mécanique de caractère.
À l’occasion de ce portfolio, Denis s’est prêté au jeu du commentaire de ses œuvres. Techniques, inspiration, thématiques, vous trouverez ici un arrêt pédagogique sur images, façon making of. Si vous voulez bien passer au salon, chers lecteurs…

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